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Vie de La Brochure
22 août 2014

Jennar, Mélenchon et l'alternative

Avec la décision confirmée de Mélenchon qui abandonne la coprésidence du Parti de Gauche (voir sur son blog les précisions) un débat s'est engagé sur l'avenir du Front de Gauche. A ma modeste place, j'y ai participé en relayant et commentant quelques textes comme je le fais aujourd'hui pour Jennar. Comparer le résultat d'une présidentielle et d'une européenne n'est pas digne du grand expert qu'il est. Croire qu'aux législatives il aurait suffi d'avoir plus de candidats du PG pour se rapprocher du résultat des présidentielles n'est pas plus sérieux. Je ne pense pas non plus que quelques alliances du PCF avec le PS soit le tournant évoqué car c'était déjà le cas aux Régionales dès 2010 ! Mais ceci dit je partage le souci de Jennar tentant d'analyser les questions posées en allant au fond des enjeux. La solution ça serait plus de vert dans le rouge ? Alors étudions le cas et l'échec de Juquin, dans un contexte il est vrai totalement différent, mais en se souvenant que la base de son projet était aussi écosocialiste. Mélenchon prépare un nouveau livre. Est-ce qu'il ne croit pas trop à son étoile ? Le débat mérite les efforts démocratiques de chacun. Jean-Paul Damaggio

 Voici les liens précédents :

Le bilan de Mélenchon / Le rapport droite/gauche / Sur l'Huma face au cas Mélenchon

Mélenchon prend du recul / Marcos, Lénine, De Gaulle et l'organisation

 

Voici l'article de Jennar.

Le Parti de Gauche : l’heure de la réflexion et des choix nouveaux

Le Parti de Gauche va se réunir pendant quatre jours à Grenoble. Ces « remue méninges » arrivent à point, après deux scrutins qui clôturent un cycle ouvert en 2009.

Le PG s’est créé comme un « parti creuset » dont la volonté était de contribuer au rassemblement de la gauche de gauche. Les divisions de celle-ci garantissaient son impuissance à offrir une alternative aux politiques néolibérales imposées tantôt par la droite décomplexée, tantôt par cette droite complexée formée par le PS et ses alliés.

Le PG a voulu que se crée le Front de Gauche avec le PCF. Le succès des élections européennes de 2009 – qui montrait au NPA qu’il se trompait dans sa démarche solitaire, mais qui avait raison de se méfier du PCF – a créé une dynamique que le formidable résultat de Jean-Luc Mélenchon au premier tour des présidentielles a accentuée. Trois courants issus du NPA (Gauche unitaire, Gauche anticapitaliste et Convergences et alternatives), les Alternatifs et la FASE se sont rassemblés pour constituer la troisième composante du FdG, Ensemble.

Et tout s’est fracassé lorsque le PCF, pour les municipales, a fait le choix de s’allier avec un PS dont il prétend combattre les politiques. Le message du FdG s’est brouillé, sa crédibilité a fondu comme neige au soleil. Le résultat des municipales, puis des européennes fut à l’inverse des attentes suscitées par le premier tour des présidentielles. A l’heure où le PCF annonce la présence de son principal dirigeant à la prochaine université d’été du PS, il ne faut plus se voiler la face : le Front de Gauche est mort.

Une faiblesse initiale

On ne s’est pas assez interrogé sur la différence entre le résultat du premier tour des présidentielles et celui du premier tour des législatives, en 2012.

Bien des électeurs de Jean Luc Mélenchon n’ont pas voté pour un candidat du Front de Gauche aux législatives lorsque celui-ci appartenait au PCF. Pourquoi ? Voilà la question qui fut esquivée et à laquelle il importe aujourd’hui de répondre.

Pour moi, la réponse est évidente. Au XXIe siècle, un défi nouveau s’inscrit dans les esprits : l’écologie. Les disciples de Marx ont occulté la pensée de celui-ci lorsqu’il affirmait que « le capitalisme exploite les hommes et la terre ». Ils n’ont retenu que l’exploitation des humains. Ils ont cru, avec la foi du religieux, dans les bienfaits sans limite des progrès scientifiques, oubliant totalement que ce qui importe, c’est l’usage qu’on fait de ces progrès. Le PCF porte la marque de son adhésion au programme nucléaire, de sa culture productiviste. Au nom d’une conception à court terme de la défense de l’emploi, il défend les industries d’armement au lieu d’encourager leur reconversion. Il défend des projets inutiles, coûteux et anti-écologiques comme celui de ND des Landes. Par contre, il multiplie les arguments de mauvaise foi pour démolir l’écosocialisme.

Pour des centaines de milliers de femmes et d’hommes qui ont une exigence égale à l’égard de la justice sociale et des exigences écologiques, il est impossible d’apporter leur soutien au PCF.

Si on ajoute que le PCF tient un discours ambigu sur le sujet capital de l’Union européenne, laissant entendre qu’on peut la réformer de l’intérieur, qu’une Europe sociale est possible dans le cadre institutionnel et légal actuel et qu’il n’adhère que timidement à l’exigence d’une VIe République restaurant la souveraineté populaire comme primat de la démocratie, on comprend le résultat misérable des européennes.

Il faut être conscient que pour un électorat en attente d’une véritable alternative, le Front de Gauche, avec le PCF en son sein, n’est pas la réponse.

Je l’écris avec une infinie tristesse. Parce que je ne confonds pas le PCF et les communistes. J’en connais beaucoup. Des militants d’un dévouement sans bornes, d’un engagement sans failles, d’un savoir faire étendu, qui ajoutent souvent une dimension culturelle très riche à l’engagement politique, qui gardent une vraie conscience de classe. Et qui sont aujourd’hui désolés et malheureux en voyant le mal qu’a fait la direction de leur parti au Front de Gauche en s’alliant dans de nombreux endroits avec le PS. J’en connais qui quittent actuellement le PCF parce que, me disent-ils, ils veulent rester fidèles à l’idéal communiste.

Et maintenant ?

On ne change pas une structure de l’intérieur. Encore moins un parti politique. N’est-ce pas cette conviction qui explique le résultat du congrès de Tours  en 1920 ? Mais à quoi assistons-nous depuis tant d’années aussi bien au PS qu’au PCF ? Des militants de qualité, lucides, attachés aux objectifs au point de ne pas les sacrifier par des reniements, se sont épuisés et s’épuisent encore pour tenter d’ancrer leur parti dans la fidélité au socialisme. En vain. Des milliers d’heures de débats, de rencontres, de motions, pour rien. Car jamais, ni au PS, ni au PCF, ils n’ont été en capacité d’infléchir la ligne directrice du parti.

Beaucoup ont quitté le PCF à telle enseigne que le parti le plus nombreux de France demeure celui des anciens membres du PCF. En 2008, Jean Luc Mélenchon et ses amis ont tiré les conséquences de leur incapacité à changer le PS et l’ont quitté.

Le PCF nous montre qu’il ne change pas. Il a choisi l’objectif qui consiste à sauver à tout prix ses élus locaux, régionaux, nationaux et européens et adopte à cette fin une stratégie à géométrie variable : avec le FdG s’il peut éviter qu’apparaisse sa véritable force (1,93% en 2007), avec le PS partout où il a des sièges à sauver. Et d’oublier que sa stratégie d’alliance avec le PS se traduit à chaque scrutin depuis 1981 par un recul de son influence et une perte d’élus. La lutte des places a remplacé la lutte des classes même si le seul résultat est qu’il y a de moins en moins de places sauvegardées. Sans que la participation du PCF à des exécutifs dominés par le PS ne parvienne à infléchir les choix de ce dernier.

Il faut en prendre acte. Les choix actuels du PCF mettent fin aux raisons d’être du Front de Gauche. Il doit en assumer la responsabilité.

« Il faut pouvoir, parfois, être unitaire pour deux » va-t-on rétorquer. Mais à quoi sert une unité qui nous fait passer de 11,10 % en 2012 à 6,33 en 2014 ? L’unité n’est pas une fin en soi ; c’est un outil pour réaliser des objectifs. Il est manifeste que l’outil FdG n’est plus pertinent et qu’il faut trouver une autre forme d’unité de la gauche de gauche.

N’est-il pas temps de se rendre compte que les accords d’appareil, respectueux des logiques d’appareil, sont mortifères ?

N’est-il pas temps de se rendre compte que le peuple est fatigué des combines pour se réserver des mandats ?

N’est-il pas temps de se rendre compte que les gens attendent non plus des instructions venues d’en haut, mais d’être décideurs ?

N’est-il pas temps de se rendre compte qu’une dynamique pour une alternative de gauche ne peut plus naître de l’adhésion du grand nombre aux choix de quelques-uns ?

N’est-il pas temps de se rendre compte que la crédibilité d’un projet passe par la cohérence entre le dire et le faire ?

Reprenons l’idée initiale du PG : un parti creuset.

Quel est son bilan ?

Sur le plan conceptuel, le PG laisse un double legs : l’écosocialisme et la VIe République : un projet de société et le cadre institutionnel dans lequel l’inscrire. C’est énorme. Nous sommes trop modestes, trop discrets et nous communiquons mal sur cet apport essentiel du PG au débat politique.

Sur le plan structurel, le PG a construit une organisation certes encore faible, mais présente sur l’ensemble du territoire national.

Le temps n’est-il pas venu de dépasser cette organisation ? De faire franchir au PG une nouvelle étape ? Celle de mettre cette organisation à la disposition d’un rassemblement plus large, ouvert à toutes celles et tous ceux, d’où qu’ils viennent, qui veulent porter ensemble le projet écosocialiste et la VIe République ?

N’est-il pas temps d’annoncer que le PG est prêt à se fondre dans un rassemblement beaucoup plus vaste pourvu que ses membres adhèrent à ce double projet et s’engagent à refuser tout compromis programmatique, toute alliance électorale (du local à l’Europe) avec des forces politiques qui adhèrent à ce que l’on combat ?

N’est-il pas temps de démontrer que la fin se trouve déjà dans les moyens et qu’on ne peut proposer une société qui donne le pouvoir au peuple si on n’est pas capable de le donner à ses propres adhérents ?

N’est-il pas temps de faire preuve de créativité et de rechercher tous ensemble des formes d’organisation où les décisions ne sont plus le fait d’états-majors parisiens, mais d’une délibération collective décentralisée ?

Telles sont les questions que je soumets à mes camarades dans l’espoir que nous en débattions à Grenoble. Tous ensemble.

Raoul Marc Jennar

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