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Vie de La Brochure
22 janvier 2015

N°21 des Zindigné(e)s

zindignés

 

 

Nouveau numéro du mensuel Les Zindigné(e)s où se multiplient les rencontres par de longs débats avec par exemple Nicolas Sersiron auteur de « Dette et extractivisme, la résistible ascension d’un duo destructeur » (Editions Utopia). Je retiens son point de vue sur le fait que les Médis ne se veulent plus le quatrième pouvoir mais le pouvoir lui-même, idée que j'ai étudié à partir d'un cas ancien, Sylvia Zappi, journaliste au Monde qui souhaitait décider de la vie de "la gauche de la gauche" son terrain d'intervention. Rencontres avec les animateurs de la lutte contre Center Parcs et surtout quant à ce compte-rendu avec Yvon Quiniou pour son livre « Critique de la religion – une imposture morale, intellectuelle et politique » aux éditons la ville brûle.

Yvon Quiniou est un philosophe marxiste dont le souci n’est pas de démontrer que Dieu n’existe pas, mais dont la réflexion porte sur l’action terrestre surtout des trois monothéismes bien connu, chrétien, juif et musulman. Il traite de multiples questions à partir d’une analyse concrète de la situation présente. Je ne retiens qu’un seul thème. JPD

 

 (Le débat est antérieur aux événements de janvier)

« Les Z'indigné(e)s : Comment comprends- tu le retour en force de l'imposture religieuse dans le domaine des sciences avec notamment la remise en cause du darwinisme, avec les thèses en faveur du dessein intelligent ?

Yvon Quiniou : Je précise que ce mouvement anti-darwinien vient d'abord des Etats-Unis, où 90 % de la population se déclare croyante, où des formes multiples, irrationnelles et rétrogrades de religiosité fleurissent et où la religion est officiellement présente dans la politique et la vie sociale : les présidents prêtent serment sur la Bible et la référence à Dieu figure sur le dollar.

Cela explique d'emblée l'origine de ce mouvement, par le contexte idéologique américain. Et j'ajoute qu'il a d'abord pris la forme d'une défense soi-disant scientifique d'un « créationnisme biblique » littéral, proprement délirant, avant de prendre la forme plus subtile du « dessein intelligent » : celui-ci ne récuse pas l'évolution, mais prétend qu'elle ne peut se comprendre, «scientifiquement » à nouveau, que si l'on fait l'hypothèse d'une intention divine qui la dirigerait pour permettre à l'homme d'apparaître !

On est, bien entendu, en pleine idéologie religieuse recyclée au contact de la science ! Le drame est que ce mouvement est soutenu par des organisations financières comme la fondation Templeton qui entendent officiellement lutter à la fois contre le matérialisme, Darwin, Marx et Freud (je cite) et qui ont des relais en France comme l'Université interdisciplinaire de Paris (qui n'est d'ailleurs pas une université !), dirigée par Jean Staune, laquelle trouve malheureusement des appuis dans les milieux scientifiques, spécialement chez les physiciens. Un colloque récent organisé par les inspections de SES et de philosophie a décidé de contrer ce mouvement et a imposé aux enseignants de ne pas mettre sur le même plan théorie scientifique et croyance religieuse. Mais cette propagation de l'anti-darwinisme est à mettre aussi en rapport avec le retour proprement politique du religieux.

Les Z'indigné(e)s : Pourquoi justement ce retour en force de l'imposture religieuse dans le domaine politique ?

Yvon Quiniou : Répondre à cette question revient à compléter la réponse antérieure. Car le mouvement des idées n'est pas indépendant de la société et des conflits qui la traversent c'est encore la grande leçon de Marx avec son concept d'idéologie. Or il est clair que la crise actuelle du capitalisme, énorme et mondiale, avec des effets désastreux sur la situation des hommes - paupérisation, chômage, inégalités croissantes, guerres ou risques de guerres, etc. - contribue à alimenter le recours spontané à la religion comme « expression de la détresse réelle de l'homme » et comme compensation imaginaire à celle-ci, comme « opium » qui soulage mais ne guérit pas. Mais ce n'est pas tout, car ce recours n'est pas seulement «spontané » il est aussi délibérément entretenu par les pouvoirs en place soit pour créer comme toujours de la résignation, soit pour justifier l'ordre social par un pessimisme anthropologique facile (=l'homme est mauvais puisque « pêcheur ») qui interdit d'envisager une amélioration de la vie ici-bas, soit enfin pour créer du « lien social » dans une société libérale qui précisément en détruit les bases (voir les discours de Sarkozy quand il était au pouvoir).

Bref, Stendhal avait pratiquement tout dit quand il affirmait que « l'idée la plus utile aux tyrans est celle de Dieu ». Il suffit d'élargir la notion de tyrannie à l'ensemble des pouvoirs de classe et, surtout, à la tyrannie de l'économie capitaliste qui asservit les peuples !

Les Z'indigné(e)s : Quels enseignements tirer de ta critique du religieux à l'égard du stalinisme ? Que peut-on en conclure au sujet de notre rapport à la politique, à la forme parti, à la figure du militant « moine-soldat » ?

Yvon Quiniou : Il faut être prudent avec le terme de « religieux ». C'est de la religion au sens strict que je parle et c'est celle-ci que je critique. Mais il est vrai qu'il y a eu en politique des attitudes de type religieux (ce n'est pas pareil) qui ont perverti la politique dite «communiste» au XXe siècle comme le stalinisme mais aussi le maoïsme message idéologique porté à l'absolu et interdit de critique comme l'a été la Bible, foi aveugle en lui, culte d'un chef déifié, espoir en un futur parfait assimilé au paradis sur terre et qui devait nécessairement advenir, messianisme politique donc, etc. On y retrouve à la fois des attitudes intellectuelles, des comportements et des traits psychologiques propres aux religions, comme la fixation sur un père idéal et sublimé ou le phénomène de l'illusion, mais dans une perspective historique. C'est ainsi qu'on peut légitimement dire que le marxisme a fonctionné longtemps comme une religion alors qu'il n'est pas une religion et ne doit pas l'être. Plus largement, il faut assainir notre rapport militant à la politique, en avoir une vision athée qui en fait une pratique démocratique et joyeuse, loin de toute soumission à une doctrine ou à un chef, lui enlever tout rapport sacrificiel à notre vie personnelle et se dire que, si la politique c'est beaucoup, ce n'est pas tout dans une existence, quelle que soit son importance anthropologique et la passion qu'on lui porte.

zindignés

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