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Vie de La Brochure
1 octobre 2015

De quoi a besoin la Catalogne ?

Vicenç Navarro

Loin de moi l'idée de répondre à cette question à la place des Catalans mais dans le journal Publico Vicenç Navarro[1], un universitaire de Barcelone, apporte des éléments de réflexion que je souhaite partager.

Les classes populaires de la Catalogne d'aujourd'hui connaissent une détérioration phénoménale de leur situation sociale, un fait que les grands médias refusent de traiter. Augmentation du chômage, difficulté pour se soigner, une baisse des salaires qui sont devenus les plus bas des quinze pays développés de l'Union européenne. Quant aux services publics leur détérioration ou privatisation provoquent un mal être général. Résultat, 25 à 30% des plus riches utilisent des services privés et les autres des services publics en mauvais état. Un face à face qui est la marque de ce qu'en Espagne on appelle La Grande Récession.

Pourquoi cette situation ? A cause des "méchants" de Madrid ?

L'essentiel n'est pas dans l'écart entre ce que la Catalogne verse à l'Etat central et ce qu'elle en reçoit, mais dans la domination des forces conservatrices catalanes qui tiennent entre leurs mains toutes les institutions financières, économiques, politiques et médiatiques. Le pujolisme a fait la pluie et le beau temps et surtout la pluie sur les classes populaires, considérant que la Catalogne était sa propre propriété !

Et allons plus loin : le pujolisme a conduit sa politique avec la complicité de l'Etat espagnol en soutenant parfois la droite et parfois le PSOE !

Dans ce contexte, l'indépendantisme voudrait effacer l'ardoise sociale. Toutes les lois d'austérité, nationales ou catalanes, ont été approuvées par les partis catalanistes !

Vicenç Navarro ne cache pas que sur le plan économique et social, il est proche du parti indépendantiste CUP, mais il pense qu'au nom de l'indépendance la CUP fera passer ses propositions sociales sous la table (les dernières déclarations des dirigeants de ce parti confirment cette hypothèse). Alors que les néo-libéraux qui vont diriger le seront encore plus ! Sala i Martín l'économiste en vogue des indépendantistes affiche des idées très à droite sans que la gauche et y compris la CUP, ne réagisse ! Oriol Amat, l'autre économiste, un hypothétique futur ministre, n'est pas mieux !

Quant au nouveau parti qui a fait un beau score, Ciudadanos, il appartient dans le Parlement européen à la même vague néo-libérale. Son économiste de référence est Luis Garicano, très proche du grand patronat espagnol ou catalan. Il a fondé leur blog de référence Nada es gratis ! Il y a bien longtemps, Umberto Eco l'a indiqué : la grande bataille des temps présents n'est plus entre les deux classes sociales, mais entre… les multinationales ! Les droites (y compris celles qui se disent de gauche) se battent et occupent tout le terrain !

Le mouvement indépendantiste qui exprime aussi un grand mécontentement pourrait avoir des aspects positifs mais l'aspect identitaire ayant pris le dessus il conduit à des impasses. D'un côté les indépendantistes et de l'autre (avec PP et Ciudadanos) ceux qui se disent non-indépendantistes, bloquent la réflexion globale. Pour passer leur message les indépendantistes n'ont pas cessé de répéter "Som un sol poble" (nous sommes un seul peuple) ce qui n'est pas le cas ! Aussi, pour réagir, ceux qui voulaient toujours se considérer d'abord comme Espagnols ont voté Ciudadanos qui a obtenu ses meilleurs résultats dans les quartiers ouvriers parlant surtout espagnol !

 En terme de propositions, Vicenç Navarro pense que si la question sociale avait été mise en avant avec plus de vigueur par les gauches le thème identitaire aurait pu passer au second plan. Position qui n'est autre que celle de Podemos : unir les forces sociales de Catalogne avec celles du reste de l'Espagne, position qui pourra mieux s'affirmer dans les élections générales. Vicenç Navarro note que cette position a été à la fois combattue avec force par Artur Mas… et par la CUP et que prise entre deux feux, et peu présente dans les médias elle n'a pu être entendue. Or la force politique autour de Podemos n'a cessé de répéter qu'elle était pour la souveraineté catalane (un référendum pour décider) mais pas pour l'indépendance. A suivre avec les élections de décembre.

Jean-Paul Damaggio



[1] Auteur de Ataque a la democracia y al bienestar. Crítica al pensamiento económico dominante. Anagrama, 2015

 

 



[1] Auteur de Ataque a la democracia y al bienestar. Crítica al pensamiento económico dominante. Anagrama, 2015

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