Teruel au Moyen-âge

Comme d'autres j'ai cru longtemps qu'entre les grandeurs de l'empire romain et la Renaissance, le Moyen-âge n'avait été qu'une période sombre de l'histoire de l'Europe car Europe il y avait déjà.

Renaissance ? Mais par rapport à quelle mort ?

Renaissance ? Parce que Rome pouvait à nouveau donner le ton de la civilisation ?

 Chaque civilisation a ses contradictions. Mon ami René Merle vient de rappeler sur son blog comment par l'esclavage les Romains purent construire un empire si phénoménal. Marx rappelle que pour le capitalisme la contradiction bien connue, entre forces productives et rapports de production, ne peut que conduire au socialisme.

 Pour le Moyen-âge, en rappelant la grandeur des Troubadours le mouvement occitan m'a permis de relativiser le jugement négatif porté sur l'époque. Puis petit à petit j'ai mesuré la grandeur propre à ce moment d'histoire qui a réussi à créer les langues que nous parlons aujourd'hui : espagnol, italien, français, occitan (mais qui se parle peu) etc.

Or, la grandeur immanquable, je l'avais sous les yeux avec le cloître de Moissac et donc tout ce qui concerne l'art roman. Face à la mort du politique propre aux grecs et aux romains, le féodalisme a vu naître et se développer les merveilles issues de l'initiative populaire.

 La ville espagnole de Teruel témoigne de cette grandeur à une charnière de l'histoire entre 1100 et 1300. Charnière par la reconstruction du politique autour des rois balayant les féodaux et charnière par l'inventivité qui reste présente et dont les éléments architecturaux témoignent encore.

 Ainsi, l'inquisition médiévale née en France avec les Albigeois va devenir politique avec la Renaissance. A Teruel en 1100 les catholiques victorieux vont laisser arabes et juifs dans la ville pendant trois siècles, avec leur langue, leur religion, mais gardés sous surveillance. Ce n'est pas du temps de "l'infâme" Moyen-âge qu'arabes et juifs seront chassés mais bien après… avec la civilisation nouvelle.

 Pendant trois siècles en Aragon des arabes vont donner naissance à ce qu'au 19 ème siècle on appellera l'art mudéjar devenu "à la mode" un siècle après pour le bonheur du tourisme.

 Ainsi à Saragosse a été reconstruit de toute pièce un château - sur le vestiges détruits pendant des années, et laissés par l'art mudéjar - au point que ce château est devenu le lieu symbolique du pouvoir régional !

 Nous ne sommes pas ici dans le contexte de l'Alhambra de Grenade qui était une merveille construite par les arabes pour les arabes mais dans le contexte où des arabes ont construit des clochers d'église à leur manière au profit des catholiques. Et on ne va plus cesser d'étudier el andaluz…

 Je conclus en disant que l'art roman se caractérise comme art sans la politique. Il y avait bien sûr le pouvoir du clergé mais qui était un pouvoir divisé, un pouvoir parmi d'autres, un pouvoir qu'ensuite les rois rendront… de droit divin, le droit ayant peu à voir avec le divin.

Jean-Paul Damaggio

P.S. Sur la photo qui perd de sa qualité à cause des conditions d'internet, une des nombreuses tours qui ornent la ville.