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Vie de La Brochure
14 septembre 2016

FLORENCE ET L'ART DU DESSIN et Campagnac

la perspective

Une entreprise française a volé le nom de Vinci pour sa propre gloire. Une entreprise française a volé le nom de Giotto pour sa propre gloire (elle vend des outils de dessin). Ainsi va ce souvenir historique que Campaganc décortique ici. J-P Damaggio

Le Matin 26 mai 1935

FLORENCE ET L'ART DU DESSIN

Au moment où s'ouvre la resplendissante saison de l'art italien au Petit Palais et au Jeu de Paume, il n'est peut-être pas inutile de relire le livre si pénétrant que Stendhal consacra, au début du XIXe siècle, à l'histoire de la peinture en Italie. Distinguant entre les diverses écoles italiennes, Stendhal nous montre que le dessin fit la gloire de l'école de Florence, comme la vérité et l'éclat des couleurs illustrèrent l'école de Venise.

« Les peintres florentins, nous explique-t-il, étaient portés à ce genre de perfection par le caractère national, exact et attentif au détail, plutôt que passionné. La noblesse, la vérité, l'exactitude historique brillent dans leurs tableaux avec la science du dessin c'est que Florence fut de bonne heure la capitale de la pensée. »

Florence fut, en effet, un véritable laboratoire où toutes les techniques de l'art furent étudiées par des hommes qui n'étaient pas seulement des esprits amoureux d'idéal, niais aussi des savants, des architectes, des physiciens, des géomètres passionnés de précision. Sans doute, les Florentins du XVe siècle avaient-ils déjà derrière eux un lourd passé de gloire. Giotto, mort en 1336, n'est-il pas le premier des grands peintres florentins ? Mais si Giotto traduit son idéal - avec quelle puissance et quelle poésie - il n'en est pas moins vrai que son dessin est souvent incorrect. L'effort florentin du XVe siècle vers la finesse et la précision était donc nécessaire. Stendhal, avec raison, rend hommage à cet effort et, s'il était aujourd'hui parmi nous, il ne manquerait pas, comme prélude à la visite des merveilles rassemblées à Paris, de s'arrêter à l'Ecole des beaux-arts où se trouvent réunis, par les soins de l'érudit M. Lavallée, tout un ensemble de chefs-d'œuvre du dessin italien.

Au début du XVe siècle, le dessin italien en était encore à des essais timides et l'exposition de l'Ecole des beaux-arts nous en donne un probant témoignage. Dans un album d'histoire naturelle, nous voyons des plantes et des animaux représentés par un dessin au crayon inexpérimenté et gauchement coloriés. Qu'il y a loin de ce travail naïf à la Tête de femme, si délicate et si humaine, d'Andrea del Sarto, que nous trouvons à la même exposition. Que d'efforts auront à réaliser les artistes florentins pour arriver à la perfection qui caractérisera l'époque de Léonard de Vinci. Ces efforts, ils les accompliront avec une volonté admirable, trouvant dans la reproduction des apparences tout un ensemble de problèmes précis pour lesquels les lois éternelles de l'art, lois de l'anatomie, lois de la perspective, lois de l'harmonie, leur donneront des solutions méthodiques. Les artistes florentins comprennent qu'ils doivent serrer et épurer la forme et, pour atteindre ce but, ils étudient avec passion l'anatomie du corps humain.

Mais les lois de l'anatomie doivent se compléter par les lois de la perspective. Pour représenter la réalité dans toute sa beauté, il ne suffit pas de traduire, dans un dessin, une surface plane, il faut aussi exprimer la troisième dimension, la profondeur. En établir la technique sera la tâche de Paolo Uccelo, élève de Guiberti et de Donatello, homme de science en même temps qu'artiste.

C'est une véritable bataille contre les mystères de la beauté que livrent ces hommes, c'est une véritable victoire sur la nature qu'ils remportent. Tandis que Paolo Uccelo trouve les lois de la perspective, Piero della Francesca, s'inspirant de la tradition pythagoricienne, recherche dans la géométrie les lois de l'harmonie. C'est lui qui se penchera sur le problème de la section d'or, établissant que l'harmonie dans un tableau doit nécessairement reposer sur un rapport arithmétique toujours constant, que l'on rapproche deux parties inégales de l'œuvre ou l'une de ses parties avec l'ensemble. Ce nombre d'or ou section dorée est un secret des ateliers florentins et Pacioli, « le moine ivre de beauté », élève de Piero della Francesca, se verra reprocher avec véhémence de l'avoir divulgué. Ce secret, tous les artistes de la chrétienté chercheront à le pénétrer et, au cours d'un voyage en Italie, Albert Dürer se rendra de Venise à Bologne dans l'espoir d'être initié « à la perspective secrète ». Léonard de Vinci croyait, lui aussi, à la vertu du nombre d'or lorsqu'il disait « Ne sais-tu pas que notre âme est faite d'harmonie et que l'harmonie ne s'engendre que de la simultanéité où la proportion des objets se fait voir ? » Avec Léonard de Vinci triomphe « l'esprit florentin qui attend sa réussite des seules ressources de la pensée lucide, si maîtresse d'elle-même qu'elle en paraît froide, malgré la passion qu'elle apporte à s'exercer ». Mais, dans son œuvre, la rigueur du dessin, l'impeccable raffinement de la ligne se complètent par une impression de charme indéfinissable. Edmond Campagnac

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