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Vie de La Brochure
27 octobre 2017

Darwin sur Nouveau Projet

Le magazine québécois que j'ai déjà évoqué publie un article sur Darwin que je reprends pour plusieurs raisons. Tout d'abord il me rappelle une conservation entendue à la Bibliothèque de Montréal en attendant l'arrivée de Le Clézio qui tenait une conférence. Derrière moi deux universitaires se plaignaient des nouvelles mesures aux USA où tout le travail des professeurs était évalué à partir du nombre de publications. Toujours la question du quantitatif sur le qualitatif. Mais en même temps à démontrer dans l'article que le grand Darwin ne travaillait que 5h par jour c'est reprendre le quantitatif pour le critiquer. Par exemple, la correspondance est-ce un travail ou un loisir ? Dans son cas je pense qu'il s'agit d'un fort travail. Et y compris une promenade, c'est pour observer les oiseaux et penser avec ?

Darwin n'était ni un bourreau du travail ni un fainéant mais comme toute personne il avait sa façon de vivre. Et quand Macron dénonce les fainéants j'avoue que je m'interroge sur ses critères qui doivent eux aussi tenir sans doute au temps de travail. Quand on a deux cents collaborateurs à votre service on a un autre sesn du travail. JPD

 

DARWIN ÉTAIT UN FAINÉANT (DONT ON DEVRAIT S'INSPIRER)

Extrait d'un article publié le 3o mars 2017 dans le magazine scientifique Nautilus.

DÈS 8h— SOIT APRÈS sa promenade matinale et son déjeuner—, Darwin travaillait sans interruption pendant une heure et demie dans son bureau. À 9h30, il se tournait vers le courrier du matin et sa correspondance. À 10 h30, il se remettait aux activités plus sérieuses, parfois dans la gloriette, la serre, ou un autre immeuble d'où il menait ses expériences scientifiques. À midi, Darwin déclarait «Voilà le travail» et sortait pour une longue promenade sur le sentier Sandwalk, qu'il avait aménagé peu après l'achat de la Down House. Il revenait à la maison au moins une heure plus tard, dinait et se remettait à sa correspondance. À 15h, il s'allongeait pour la sieste et à son réveil, une heure plus tard, il retournait se promener sur le Sandwalk. Il travaillait à nouveau dans son bureau jusqu'à 17h30, heure à laquelle il rejoignait sa femme, Emma, pour le souper familial. C'est en suivant cet horaire qu'il a rédigé 19 livres, y compris des ouvrages sur les plantes grimpantes, les pouce-pieds et autres sujets; le controversé La filiation de l'homme et la sélection liée au sexe; ainsi que L'origine des espèces, sans doute le livre le plus célèbre dans l'histoire de la science, qui influence encore aujourd'hui notre perception de la nature et de l'humain.

Tout examen de son emploi du temps révèle inévitablement le paradoxe du créateur. La science constitue la pierre angulaire de la vie de Darwin. Dès ses études de premier cycle, il se voue à la collection, à l'exploration et enfin à la théorie scientifique. Il quitte Londres avec Emma pour s'établir en campagne afin d'avoir plus de place pour, élever sa famille, et plus de place aussi pour la science, proprement et symboliquement. La Down House lui fournit les laboratoires et les serres, et la campagne, la tranquillité nécessaire au travail. Pourtant, on ne qualifierait pas son horaire de particulièrement chargé, comptant trois périodes de «travail» de 90 minutes. Aujourd'hui, s'il avait été professeur d'université, on lui aurait refusé sa permanence. En entreprise, on l'aurait congédié en moins de cinq jours.

Darwin n'était pourtant pas insouciant de son horaire, ni sans ambition. Il se préoccupait beaucoup du temps. Il n'en avait pas à perdre, quoiqu'il fût bien nanti. En voyage autour du monde à bord du HMS Beagle, il avait écrit à sa sœur Susan Elizabeth que «l'homme qui ose perdre une heure de son temps n'a pas encore constaté la valeur de la vie ». Lorsqu'il délibérait sur son mariage potentiel, il s'inquiétait de «perte de temps» et de «l'impossibilité de lire en soirée». Il enregistrait dans son journal le temps que lui grugeait la maladie. Il a d'ailleurs confessé, dans son autobiographie, que son «amour des sciences avait été aiguillonné par l'ambition d'être estimé de [ses] collègues naturalistes». Ses idées et leurs conséquences provoquaient parfois en lui des crises d'angoisse tant il était passionné et motivé.

Cela peut sembler contradictoire ou témoigner d'un équilibre hors de portée pour la majorité d’entre nous. Et pourtant Darwin, Lubbock et bien d’autres personnages créatifs et productifs ne s’accomplissaient pas en dépit de leur propension au loisir, mais bien grâce à celle-ci. Même à l’ère actuelle du 24/7, on peut apprendre à bien conjuguer travail et repos pour devenir plus intelligent, créatif et heureux.

Darwin n’est pas le seul scientifique célèbre ayant consacré sa vie entière à son travail, mais selon un horaire très modéré. Le phénomène est si commun en sciences qu'il mérite qu'on s'y attarde, surtout en regard de la nature compétitive et imposante du domaine. Les réalisations des scientifiques sont bien documentées et faciles à comparer: nombre d'articles et de livres publiés, prix et fréquence de citation. L'héritage d'un scientifique se mesure souvent plus aisément que celui d'un grand homme d'affaires ou d'une vedette. Par ailleurs, les différences notables entre les disciplines scientifiques font qu'on y retrouve un échantillon varié d'habitudes de travail et de tempéraments. Finalement, la majorité des scientifiques échappent à la mythification intense qui entoure (et magnifie ou déforme) les chefs de file en affaires et les politiciens.

Au début des années 195o, les professeurs en psychologie Raymond Van Zelst et Willard Kerr de l'Institut de technologie de l'Illinois ont mené un sondage sur la vie professionnelle des scientifiques, et confronté le nombre d'heures travaillées au nombre d'articles publiés. Contre toute attente, plutôt qu'une corrélation directe entre le travail et les publications, les données produisaient une courbe en «M». Celle-ci grimpait rapidement pour atteindre un sommet entre 10 et 20 heures de travail par semaine, avant de chuter remarquablement. Les scientifiques qui passaient 25 heures par semaine au travail n'étaient pas plus productifs que ceux qui en passaient 5. Ceux qui consacraient 35 heures par semaine au travail étaient 2 fois moins productifs que leurs collègues qui en travaillaient.

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