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Vie de La Brochure
14 mai 2018

Prague 68 revu par Claude Mazauric en 1978

Humanité__dimanche_Mazauric août_1978 

mazauric historien

A partir de la décision du PCF d’août 1968, ce long article de Claude Mazauric (au milieu sur la photo) tente d’expliquer que l’histoire du PCF a été linéaire. Petit à petit son parti se serait orienté vers la construction d’un socialisme à la française. Son article et la position du PCF ne peuvent se comprendre que dans le cadre du combat de l’époque. D’un côté l’anticommunisme ne cessait de répéter que le PCF voulait instaurer en France une dictature du prolétariat comme en URSS, et qu’en conséquence sa réprobation de l’intervention à Prague était seulement tactique. Une fois encore 68 est un révélateur.

Notons d’abord que si la France aujourd'hui encore se penche sur le cas 68, la Tchéquie et la Slovaquie ne s’en soucie plus de leur 68 (un voyageur revenant de Prague me l’a confirmé et ce n’est pas surprenant puisque les recherches du printemps de Prague ont peu servi en 1988 :ême si un temps Dubeck est devenu président de l'assemblée nationale).

Notons ensuite qu’en 1978 la répression allait bon train en Tchécoslovaquie et on se demande qui pouvait croire que le socialisme s’imposerait par la force, la répression, lui qui a besoin dans son principe, de l’action de chacun, de la créativité de chacun.

Notons enfin que l’essentiel des mesures du PCT de 68 concernèrent la fin de la censure.

Le PCF a eu une histoire toujours très mouvementée (comme les autres partis) car l’histoire générale est elle-même très mouvementée. Mazauric sait très bien que la position du PCF en août 1968, si elle a eu une seule opposition au Comité Central, en a eu beaucoup plus dans l’organisation (le Comité Central a toujours été le reflet des positions de la direction plus que le reflet des positions de la base). L’attachement à l’URSS des membres du PCF n’était pas seulement sentimental mais beaucoup plus politique. L’URSS c’était la preuve matérielle que le socialisme était la solution. Si les communistes d’URSS se trompaient alors le PCF pouvait se tromper. Encore en 1977, dans une école de formation du PCF un militant posa tout d’un coup à Guy Catusse cette question : « Le PCF peut-il se tromper ? » et spontanément j’ai répondu "oui" mais pour ne fâcher personne Guy Catusse a expliqué que «le parti» pouvait faire des erreurs mais qu’il ne se trompait pas sur l’essentiel.

D’ailleurs si l’évolution qu’évoque Mazauric va de 1965 à 1975 c’est bien la preuve que la sortie du modèle soviétique était difficile. Malheureusement pour le PCF elle aura plus un aspect tactique sur stratégique.

De 1968 à 1974 le PCF est en première ligne pour la mise en place et la défense du programme commun. De 1974 à 1981 le voilà en guerre plus ou moins ouverte avec le PS. De 1981 à 1984 retour à la case précédente très unitaire. De 1984 à 1995 la guerre avec le PS a repris. Puis de 1995 à 2002 nous en revenons à l’unité. Ces évolutions nationales n’empêchent pas au même moment que localement c’est toujours la politique unitaire.

Ce parcours en dent de scie se retrouve dans l’idée de construction d’un modèle de socialisme à la française. Pour montrer que c’est la démocratie et non la dictature qui est au cœur de sa politique, le PCF de 1968 à 1974 crie vive le programme commun. Puis vu la rupture avec le PS, le PCF va vouloir élargir son horizon en poussant plus loin sa critique de l’URSS jusqu’en 1979, en se ralliant à l’autogestion, en se liant à des mouvements négligés jusque là comme la défense des cultures régionales etc.

De 1979 à 1981 pour tenir face au PS, Marchais va mettre en place un rapprochement avec Brejnev. La nouvelle unité avec Mitterrand en 1981 (après l’élection) va encore changer la tactique sur le socialisme. Il y avait eu l'épisode eurocommuniste qui dura pas plus de deux ans.

J'ai souvent croisé Mazauric et apprécié son travail d'historien mais là il raconte une histoire plus en fonction d'un but qu'en fonction des réalités. Pour que son propos soit plus crédible les dénonciations du modèle soviétique auraient dû être beaucoup plus fortes. Et quand c e modèle s'est effondré il était trop tard pour en pointer les limites. Prague 68 a annoncé la chute du mur de Berlin en 1988.

Dans son article Mazauric indique : «La grande bourgeoisie, qui sortait (superficiellement) gagnante du grand affrontement social de mai-juin 1968… », une appréciation qui n’était pas celle de la fin mai 68 quand l’Humanité parlait de victoire des travailleurs. Donc que signifie le «superficiellement» ? Les arguments s’emboîtent trop bien dans un montage sans lendemain. J-P Damaggio

 

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