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Vie de La Brochure
25 juillet 2018

Patrick Tort à Montauban

Je retrouve cet article ancien sans date. JPD

 

Rendre compte d’une conférence de Patrick Tort c’est, comme il l’a fait lui-même à plusieurs reprises, renvoyer à ses nombreux livres dont le dernier : L’effet Darwin au Seuil. Et préciser son bilan pour lui de l’année Darwin : « une année comme les autres », une année où plus de paillettes ont brillé autour de Darwin, lui préférant évoquer comme il le fait depuis trente ans, le cœur des problématiques et des processus. Nous pourrions mentionner la forme pédagogique choisie : charpenter l’intervention sur la chronologie de la vie de Darwin. En fait, l’imprévu vient toujours au moment du débat que peut provoquer une telle intervention. Et il porta surtout…. sur la religion ! Un participant était venu avec le numéro 260 de la revue Valeurs Mutualistes où Patrick Tort répondait à quelques questions dont celle ci :

« Comment faire face [aux créationnistes] ? Comment, par exemple, les enseignants peuvent-ils répondre à leurs élèves ?

P.T. : En leur expliquant que la science est l’exploration des processus, et que la révélation religieuse court-circuite les processus : le « fait » créateur de la Genèse n’explique aucun phénomène, abolissant tout processus. Comme dans la magie. Peut-être les élèves auront-ils alors un peu honte de croire en la magie… »

L’intervenant d’accord pour reconnaître la valeur de l’exposé de Patrick Tort sur Darwin pense que le scientifique ne peut pas ensuite s’aventurer sur un terrain où il compare religion et magie.

A « gauche » on est si souvent sur la défensive qu’on fait appel à Patrick Tort pour répondre aux créationnistes plus que pour exposer ses idées. Tout comme à Montauban la peinture d’Ernest-Pignon-Ernest a été plus regardée… après avoir été partiellement détruite par des intégristes. Quant à la question des rapports magie-religion là aussi il faut s’entendre sur les mots. Patrick Tort a terminé son exposé avec « la métaphore » de la bande de Möbius qui, collée d’une certaine façon, permet par un geste continu d’écrire sur les deux faces et pour certains, c’est de la « magie ». Les magiciens sont surtout des illusionnistes.

 Autre question sur la religion : « Et s’il était possible de faire se rencontrer les textes religieux et les découvertes de Darwin ? ». Patrick Tort rappellera qu’il y a vingt ans déjà, il pensait que l’Eglise irait chercher Theillard de Chardin pour résoudre le problème et en effet, le plus tard possible, elle recompose un discours pour concilier science et dogme.

 Puis ce fut une affirmation : « Dieu ayant été inventé par les hommes, comme il n’est pas nécessaire de démontrer une inexistence, pas la peine de démontrer l’inexistence de dieu. » Et enfin : « L’homme ayant conscience de sa mort, c’est la source inépuisable de la religion. » Patrick Tort fera là aussi une intervention peu commune sur la question de la conscience (dernier rempart des religions) en allant de la cellule à l’humain. «Oui, mais n’y a-t-il pas une conscience supérieure, celle des prophètes ? »  Pas surprenant si Patrick Tort annonce alors qu’il prépare avec une autre personne un livre sur Darwin et la religion. Pour lui l’histoire des religions « si elle est bien faite » est un aspect important pour accéder à la compréhension de l’histoire de l’humanité. Il est un connaisseur de l’histoire de la religion égyptienne (c’est sur ce thème qu’il m’arriva de le rencontrer voici vingt ans) point important pour comprendre cette société (et son rapport à l’écriture).

 Une question viendra enfin clore le débat par où il avait en fait commencé : la question des langues au sens le plus sérieux des mots langues et linguistiques. Au début de son exposé, avant d’entrer dans la vie de Darwin Patrick Tort rappela une opération marketing (j’allais écrire une infâme opération marketing mais les oxymores me fatiguent) au sujet de la publication à 1 euro du livre L’origine des espèces offert avec le journal Le Monde. Il a démontré comment ce livre est un faux dramatique qui prouve que la culture à deux vitesses est en place : les faux pour les pauvres et les livres sérieux pour les autres. Quel rapport avec la question des langues ?

 Le combat très ancien de Patrick Tort consiste à présenter la pensée globale de Darwin en éditant les œuvres complètes du savant. Pourquoi ce travail se fait-il en France et pas en Grande Bretagne ? Patrick Tort dont les œuvres sont traduites en de multiples langues, indique que même quand il veut intervenir en Italie on lui demande de le faire en anglais. Cette domination de l’anglais est regrettable. Il pense par exemple que les Anglais lisent trop vite Darwin tandis que lui, obligé de passer par un travail de traduction en français, est amené à suivre au plus près la pensée de ce personnage hors du commun. Le rayonnement international du travail de Patrick Tort est donc plus fort dans le monde latin qu’anglo-saxon. Et de là on peut passer à la prise en compte du travail de Patrick Tort sur le langage, pas une linguistique réduite à une mécanique, mais prise en compte globalement. J’ai tendance à penser que Patrick Tort démontre que les encyclopédistes d’aujourd’hui existent, la démarche encyclopédiste étant la seule à permettre le travail annoncé à la fin de L’effet Darwin : « La combinaison de ces multiples perspectives [Darwin, Marx, Freud pour résumer] dans l’élaboration d’une théorie générale du devenir de la civilisation constitue, en effet, l’une des tâches scientifiques du matérialisme aujourd’hui. Sur des sujets aussi cruciaux, car s’ordonnant autour d’un grand enjeu d’émancipation et articulés désormais à un propos rationnel de survie, un peu de science permet parfois d’économiser beaucoup de philosophie. » JPD

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