Les scores de France insoumise

Les données que je rappelle, je les ai si souvent rappelées mais elles ne comptent pas dans les commentaires lus. Il s’agit du rapport entre résultats présidentielles et législatives qui suivent.

Autre article sur le sujet en 2017

En 1981 le PCF fait un peu mieux aux législatives qu’aux présidentielles, c’est "le début de la remontée électorale" ! Sauf un fait inquiétant : entre les deux le PS passe de 25,9 à 36 %. Le phénomène va se confirmer quand les législatives seront à la remorque des présidentielles : à savoir voler au second tour, au secours du gagnant.

 1981 : Marchais 15,3 (Mitterrand 25,9, PRG 2,2 et PSU 1,1)

1981 : Législatives : PCF 16,1 et PS 36%

2012 : Mélenchon 11,11. (Hollande 28,6, NPA 1,1 EELV 2,3)

2012 législatives Front de Gauche 6,9 (PS 29,3 ;: EELV 5,4)

Donc en 2012 le Front de Gauche passe de 11% à 6%. Mais le score de la présidentielle sera toujours mis en référence pour le Front de gauche si bien que quand arrivèrent les européennes de 2014 (elles jouent depuis 2004 au rôle d’élection de mi-mandat), le score de 6% a été considéré comme un échec surtout par Mélenchon. Pourquoi cette perte entre les deux élections espacées d’un mois ? Si quelqu’un me trouve une explication, je suis preneur. Or ce phénomène n’est pas circonstanciel mais bien structurel. Aux législatives l’électorat vole plus ou moins au secours du gagnant et oublie plus ou moins les perdants. Pourquoi ? La profonde crise du politique fait qu’une part de l’électorat se déplace pour tenter de gagner à la présidentielle. Ensuite il se démobilise.

2017 Mélenchon 19,5% (PS 6,3% NPA 1%) (FN 21,3)

2017 législatives France Insoumise 1,3% (PS 7,4, PCF 2,7 EELV 4,3) (FN 13,2)

Nous avons donc le même phénomène en 2017. Phénomène qui touche tout autant le FN que France Insoumise qui passe de 19 à 11%.

Mais le score de la présidentielle sera toujours mis en référence pour France insoumise si bien que quand arrivèrent les européennes de 2019 (elles jouent depuis 2004 au rôle d’élection de mi-mandat), le score de 6% a été considéré comme un échec par rapport à 19%. Quand au FN qui passe de 21 à 23%, un parti donné pour mort après les présidentielles de 2017 c’est un succès d’envergure. Or ce succès n’est pas le signe d’un développement du FN devenu RN mais le signe que pour gagner c’est vers le RN que l’électorat en quête de victoires s’est tourné.

 En 2017, à la présidentielle, France insoumise cumule trois électorats : un électorat union de la gauche (venu du PCF, du PS ou des Verts) qui pense que l’union est là (au second tour il a voté Macron pour faite barrage au FN), un électorat en quête d’alternatives (il a voté blanc au second tour) et un électorat seulement soucieux de gagner (il ne s’est pas déplacé au second tour… ni aux législatives). Ces trois électorats ont eu des positions différentes par rapport aux gilets jaunes : le premier s’est tenu loin des gilets jaunes, le deuxième a plutôt participé et le troisième s’est le plus investi dans les gilets jaunes. Bien sûr mon propos est en terme de tendances. François Ruffin qui a dit son vote Macron au second tour (le seul député LFI me semble-t-il a avoir dit son vote) a été le premier à appeler LFI à soutenir les gilets jaunes. Inversement comme l’indique Raquel Garrido, Clémentine Autain a freiné des deux pieds mais ça on le savait.

 C’est cette double analyse qui n’a pas été faite. Comment gérer ces trois électorats et permettre leur développement ? Je sais très bien que pour l’électorat «union de la gauche», le fait d’avoir permis aux membres de considérer l’abstention comme un choix pour le second tour fut considéré comme une hérésie d’autant que pendant quinze jours les médias ont matraqué : quoi, Mélenchon ne donne pas de consigne de vote ! Or le vote des membres a révélé qu’en effet il y avait trois tiers, le choix de l’abstention étant considéré aussi important que celui du vote blanc !

 La survie de France insoumise ne concerne pas que ce mouvement mais tout le courant émancipateur car les européennes ont pu confirmer que son échec n’est pas de nature à renforcer les autres. Ni le PCF, ni Génération.s, ni le PS n’ont marqué des points. Quant à EELV, comme après les toutes les européennes la division va s’opérer entre ceux qui aux municipales vont rester dans l’ombre du PS et ceux qui vont se mettre dans l’ombre de Macron.

 J’ai lu cent fois depuis que je suis gamin : unité, unité, unité… « Ah ! si tous les gens de gauche pouvaient s’unir.» Tant que la SFIO a rejeté l’union avec le PCF, le PCF qui la demandait a profité du rôle unitaire. Puis ce fut l’inverse par les astuces de Mitterrand, le PCF est devenu diviseur. Nous avons connu la grande unité du Front de Gauche avec le succès que l’on sait. France insoumise s’est présenté comme l’unité avec en son sein, des membres du PCF, des anciens des Verts, du NPA, des acteurs associatifs etc. Puis France insoumise est apparue comme des diviseurs et Clémentine Autain prétend reprendre le flambeau de l’unité. Mais l’unité pourquoi ? L’unité pour l’unité conduit toujours vers des impasses. Pourquoi le FN malgré ses multiples scissions n’est jamais impacté par les dites scissions ? Parce qu’il reste ferme sur cette position : au second tour union avec personne ! Il n’arrive pas au pouvoir mais comme le PCF autrefois, il pèse sur le pouvoir.

 Avec les municipales France insoumise va traverser sa pire tempête, soit la question est gérée avec la souplesse qu’impose cette élection, soit le mouvement va y laisser beaucoup de plumes. Mais que signifie souplesse ? A suivre. J-P Damaggio

P.S. Le dessin vient du Canard enchaîné.

PS J'apprends l'existence de critiques de cadres, qui sont mises dans le même sac que celles de Clémentine Autain, alors que nous sommes face à deux stratégies opposées (voir mes articles sur Clémentine Autain et sur Charlotte Girard). D'ailleurs les uns ne s'expriment pas dans les médias que l'autre truste abondamment