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Vie de La Brochure
21 novembre 2019

Eve Cladel, Lebsohn, Pelassa

eve cladel

Hier je suis revenu sur le cas d’Eve Cladel et un ami attentif attire mon attention sur la présence de son nom dans le livre Les écrivains francophones interprètes de l’histoire, entre filiation et dissidence Beïda Chikhi et Marc Quaghebeur :

Page 68 il est rappelé qu’en 1942 « Judith Cladel s’est adressée par courrier au sinistre «commissaire général aux affaires juives » pour prouver « la non appartenance à la race juive» non point d’elle-même mais de sa sœur Eve Cladel, qui en ces jours ténébreux avait le malheur de s’appeler Madame Lebsohn, veuve de Théo Lebsohn conseiller du roi Farouk et ancien bâtonnier au barreau d’Alexandrie mort à Versailles en 1933.»

Cette note complète utilement celle de l’entretien avec Dominique Rolin, dans Plaisirs. Elle évoque sa tante page 169 : « Je me souviens très bien du point de départ de cette histoire (La voyageuse). Une année j’ai été invitée par ma tante Vovote (le surnom d’Eve) qui vivait dans un hôtel particulier à Versailles. J’avais alors à peu près dix-sept ans… »

C’était donc autour de 1930 avant le décès du mari de Vovote.

 

mort d'ève cladel

Rappelons la situation des enfants de Léon Cladel :

Judith Cladel (1873-1958) (Pochi)

Sarah-Marianne (1875-1880)

Pierre-Alpinien Essaü (1877-1877)

Rachel-Louise (1878-1943)

Eve-Rose (1880-11 mai 1964 à Moissac, épouse de Théo Lebsohn mort en 1933 à Versailles) : Marié le 11 juillet 1925 (samedi), Paris, VI, Paris, Île-de-France, France, avec Eve Rose CLADEL 1880 (Parents : Léon Alpinien CLADEL 1835-1892 &  Julia MULLEM 1843-1923)  (témoin : Judith Jeanne CLADEL 1873-1958 )

Pierrine-Esther (1881-1965) épouse Jean Rolin (la mère de Dominique Rolin).

Marius (1885-1948) marié en 1921 avec Marthe Vervel puis en 1931 avec Henriette Laroche.

 J’aime beaucoup Dominique Rolin et pas seulement parce qu’elle a été la petite-fille de Léon Cladel mais, à la retrouver en cette occasion, je reprends ce point avec lequel je suis en total désaccord qui se situe juste quand elle parle de Judith (p. 18-19). En 1942, Robert Denoël publie le premier roman de Dominique et voilà la suite :

«Robert Denoël est ensuite tombé amoureux de moi. Je l'ai aimé, il m'a aimée. C'était ma première vraie histoire d'amour, elle a été décisive pour moi. Je sentais que la vie pouvait s'ouvrir, je sortais de mon labyrinthe. On l'a accusé d'être un collaborateur, il ne l'était pas. Mais il voulait continuer son travail d'éditeur et, pour cela, il avait besoin de papier. Il a donc été obligé de pactiser avec certains services pour en obtenir, mais il n'était pas pro-germanique. Il croyait à la victoire des Allemands... En même temps, il a sauvé Louis Aragon et Elsa Triolet qui étaient poursuivis par la Gestapo, il les a cachés. C'était aussi un grand ami de Robert Desnos et de Max Jacob. »

Je crains le voile sur les yeux de l’amoureuse. Rappelons que beaucoup de collaborateurs ont sauvé des Résistants, y compris René Bousquet… Il se trouve que j’ai croisé Pascale Froment suite à son travail exemplaire sur René Bousquet. Son livre suivant devait porter sur le collaborateur... Robert Denoël assassiné le 2 décembre 1945. Malheureusement le livre n’a pas vu le jour sans que je sache pourquoi !

 Mais revenons à Eve Cladel, tout aussi étrange que les trois autres filles Cladel. Jean-Bernard sur le Gil Blas du 28 novembre 1900 fait le bilan des enfants Cladel :

Puis deux autres, Rachel et Eve, qui rêvent le théâtre aussi, Esther qui vient de débuter et Marius qui est un des bons élèves d’un sculpteur, Bourdelle, un des artistes les plus puissants de la nouvelle génération et qui a précisément pétri le buste de Léon Cladel que la ville de Montauban a élevé sur le cours, sous le grand soleil rutilant du Midi, en face de cette disgracieuse apothéose d'Ingres dont les Quercynois sont fiers.»

Dans le Gil Blas du 16 mars 1914 indique : « Université des Annales Paris Conférence de Mme Séverine sur les Grandes misères. Auditions de M. Gabriel Nigond, Eve Cladel, Pierre Varenne. »

Dans un livre à paraître un jour peut-être, je faisais ce bilan sur son cas :

 Le cas Eve-Rose

Le Théâtre Fémina installée au sein de l'immeuble de la société d'édition de Pierre Lafitte, propriétaire notamment du magazine Femina (d'où le nom), est une salle inaugurée le 19 mars 1907. Elle héberge jusqu'en 1911 Lugné-Poe et son Théâtre de l'Œuvre, avant de se tourner vers le répertoire léger et l'opérette. Elle fermera définitivement ses portes en 1929, la société-mère ayant été revendue en 1916-1918 au groupe Hachette. Eve Cladel en sera un des piliers aumoins entre 1912 et 1914

 Sur le Gil Blas ou le Figaro :

28 juin 1912 chez Paul Souday : Eve Cladel a dit des vers de Charles de Pomairols

21 juin 1913 : « Cinq à sept chez Paul Souday Eve Cladel et de Fleurigny lisent des poètes de la duchesse de Rohan

6 novembre et 18 novembre 1913 : Audition Eve Cladel au Théâtre Fémina

2 décembre 1913 On a refusé du monde samedi et dimanche. Paraphe 1er avec Melle Cladel M. Signoret, Mme Marie Laure

6 février 1914 toujours au Fémina : Mes sœurs les bêtes, conférence de Séverine puis audition d’Eve Cladel

12 février 1914 au Fémina : Eve Cladel dira avec toute sa foi et tout son talent des vers de Maurice Rollinat

3 avril 1914 : Scènes jouées par Eve Cladel au Théâtre Fémina

2 avril 1914 : Les plus belles scènes des grands auteurs dramatiques de tous les temps seront jouées et chantées par la princesse Baratoff, Melles Eve Cladel, Marthe Brathe, Hélène Cerda etc…

9 juin 1914 Théâtre Fémina : Le Don juan d’Alfred de Musset par Eve Cladel récité avec chaleur

 Beaucoup plus tard on trouve trace d’Eve dans Le Temps : 11 juillet 1930 mariage à Versailles de la fille Lebsohn avocat cour d’appel de Paris ancien bâtonnier avec Georges Bickert croix de guerre

Puis le décès de Théo Lebsohn est annoncé dans Le Matin : 9 février 1933. Ancien bâtonnier du bureau d’Alexandrie, fondateur du lycée français, ancien député de la nation. Le faire part est de sa veuve, M et Mme Bickert, M. Henri et Jean Lebshon ses enfants.

Il aurait été marié avec Mathilde PETRACCHI puis divorcé et remarié le 11 juillet 1925 à Paris VI, avec Eve Rose CLADEL, avec Judith comme témoin.

Eve meurt plus tard, à Moissac. »

 J’ai découvert des extraits de lettres d’Eve à Edmond Picard (archives et musée de la littérature). Elle avait 23 ans !

 Lettre à Edmond Picard

Lettre Eve Cladel Grand Hotel de La Poste Port Saïd 7 juin 1903

Mon cher grand frère

Non votre lettre reçue tout dernièrement au Caire n’était pas adressée à Eve Cladel mais bien à Rose ( ?), une carte envoyée par Pochi de Trouville je suppose paraît inquiète à ce sujet. Si j’avais été plus libre de disposer de mon cœur et de mes pensées je vous aurais déjà répondu mais outre mon voyage à Mansourach, à Port Saïd d’où je vous écrit j’ai une vie très agitée pleine de soucis quant à mon travail et enfin très entourée… de jeunes admirateurs qui me suivent partout, voyagent avec les troupes, m’envoient des fleures merveilleuses de fraîcheur et de vie et espèrent arriver… jusqu’à moi. Ne riez pas, je parle sérieusement et je sais maintenant ce que c’est qu’une déclaration d’amour !! Moi-même je les écoute ( ?) gaiement, j’en plaisant mais au fond je suis quelquefois bien triste, bien seule et bien prête à aimer. On me dit : quelle femme forte et fière ! C’est vrai mon cher oncle, mais avec vous toute mon [le reste n’est pas accessible]…

 

Lettre du 9 mars 1903

Mon très cher Grand frère

Le Juré Psuké [livre d’Edmond Picard] mis fièrement en évidence sur ma table de travail me font penser tous les soirs en me couchant et tous les matins en m’éveillant à vous, à l’extrême plaisir indéfinissable que j’aurais à vous revoir, et aussi à la stupide vie compliquée que je mène et qui m’empêche d’écrire aux personnes les plus chères. Je pensais que vous m’accusiez d’indifférence mais à l’arrivée de cette vivant couverture jaune je comprends mon erreur et aussi je vous envoie un vrai baiser tendre et affectueux. Comme il y a fort longtemps que vous ne m’avez vu, vous recevrez ce baiser en souriant comme celui d’une gamine et bien non mon cher Frère j’ai beaucoup vieilli et les six mois passés à Alger m’ont donné le caractère d’une femme de trente ans. Je voulais me distraite et je me suis laissé lancer dans un milieu riche, frelaté, snob, ne pensant qu’à l’amusement inutile [le reste n’est pas accessible]…

 

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