Maurières, moi et la hiérarchie

Au cours d’un échange avec Patrick Maurières je lui indiquais au sujet de son père qui fut mon inspecteur : « je n’ai jamais aimé la hiérarchie et donc nous n’étions pas destinés à avoir des atomes crocus.»

Certains penseront qu’étant communistes tous les deux à ce moment-là, c’était une bonne raison d’avoir des atomes crocus sauf que je n’ai pas davantage aimé la hiérarchie communiste que celle de l’éducation nationale et je pourrais le démontrer.

Patrick m’indiqua alors parlant de son père instit, devenu inspecteur : «Je ne crois pas qu'il accorda une grande importance non plus à la hiérarchie.»

Je ne m’étais pas posé cette question mais c’est vrai car tout dépend du sens donné au mot hiérarchie.

Comme pour la fidélité, le courage, la fuite, l’espoir il existe pour la hiérarchie une version de gauche et une version de droite.

Je sais que je vais faire bondir des anars qui vont me dire qu’il n’y a pas hiérarchie et hiérarchie, mais que toute hiérarchie est néfaste.

Je n’ai jamais aimé la hiérarchie (et le montant de ma retraite le prouve) mais je n’ai jamais nié qu’elle puisse avoir et qu’elle a parfois un rôle utile.

Il existe le supérieur hiérarchique qui organise la coopération entre ses «subordonnés» et celui qui organise la compétition entre eux, pour mieux assumer son pouvoir.

Je ne dis pas qu’il existe le supérieur gentil et l’autre méchant, je prétends qu’il y a deux types de fonction.

Il n’y a rien de pire qu’un inspecteur qui, par gentillesse, n’ose pas assumer sa fonction, sauf celui qui, pour l’assumer, méprise ses subordonnés.

Le hasard a voulu que Maurières, sous mes yeux, ait été mis en position de sanctionner un collègue qui lui disait : « Le matin quand je prends la voiture j’ai envie de me jeter contre un arbre.» Maurières a assumé sa fonction avec toute l’humanité possible mais aussi avec toute la fermeté indispensable.

Oui je suis prêt à faire la liste des bonnes raisons d’avoir un inspecteur.

Comme je suis prêt à faire la liste des abus de pouvoir.

Après Marcel Maurières une inspectrice qui était son antithèse est venue le remplacer. Elle a compris qu’elle allait devoir mettre les bouchées doubles pour asseoir son autorité, et réveiller les lèches-culs. Car tout instit bien portant sait que certains sont prêts à tout pour obtenir les faveurs de l’inspecteur ! (Maurières en témoignera) Et certains syndicalistes ne sont pas les derniers en cette tâche qui m’a toujours beaucoup amusé.

Bref, je le répète il existe une hiérarchie qui organise la coopération (car elle ne vient pas seule) et d’autres qui poussent à la compétition plus facile à mesurer du temps où il y avait le certificat d’études.

Ces quelques notes me rappellent qu’avec André Tabarly nous étions devenus des frères et si j’étais un peu rigoureux j’écrirais un livre à sa mémoire et pas seulement celle de l’instit mais bien celle de l’homme.

Jean-Paul Damaggio

Comments

[jamme guy]

Je partage assez ce propos. De mon vécu résulte mon sentiment que les Inspectrices se conduisaient plus autoritairement que les Inspecteurs, certaines cultivant l'existence d'une cour.... J'ai été victime d’ostracisme qui me coûte aujourd'hui quelques dizaines d'euros en moins sur ma pension: "Bonne qualité pédagogique mais aptitude relationnelle mitigée (sic)" ... sous entendu avec celle qui nspecte.! (sans aucun justificatif!)..

Avec André Tabarly, nous avons pas mal réfléchi sur les thèmes indissociables Inspecteur/Inspecté et notation