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Vie de La Brochure
13 octobre 2020

Rencontre avec Christophe Guilluy

Le-temps-des-gens-ordinaires

Guilluy_sur_Marianne

En publiant cet entretien avec Christophe Guilluy, Marianne est dans son rôle. Comme je l’ai déjà indiqué plusieurs fois, je suis proche des thèses de ce chercheur aussi je ne retiens ici qu’un point que je voudrais débattre : le bloc populaire. Prenons cette phrase :

« De sorte que le discours de Chevènement a été perçu initialement comme une sorte d'attachement désuet à un monde industriel appartenant au passé. Tous ces gens, ce bloc qu'ils forment, iraient aujourd'hui à lui. Politiquement, il y a donc un décalage entre la prise de conscience de la population et le seul choix qui lui est proposé aujourd'hui, à savoir départager Macron et l'extrême droite... »

"Tous ces gens", il faut comprendre les gens ordinaires qu’il appelait auparavant les invisibles mais que les gilets jaunes ont rendu visibles.

Pour moi, tous ces gens ne forment pas un bloc ce fameux bloc auquel Podemos s’est adressé en dénonçant la caste face aux autres (95% de la population), et qui en réplique a vu la naissance d’une extrême-droite espagnole car pour s’opposer à la caste il y a plusieurs formes. Conséquence pratique : Podemos en est revenu à la stratégie d’union de la gauche tant critiqué auparavant. Mélenchon a suivi la même pente avec le même résultat. Quant à la référence au Chevènement protectionniste, il le fut après le PCF sans résultat, et pas parce que le discours sur la réindustrialisation semblait alors désuet.

Tout le monde l’a compris, la réindustrialisation n’était et n’est possible que par une baisse des droits sociaux car jusqu’à preuve du contraire aucun bloc en France n’est en mesure de faire baisser les salaires en Chine ou ailleurs. La France industrielle a été celle des centrales nucléaires, du Concorde, des LGV, autant de secteurs portés par l’Etat qui n’ont pas toujours su s’orienter dans le monde d’aujourd’hui. C’est comme quand hier il fallait croire que la masse de petits paysans pouvait tenir.

Le bloc qui a été créé est celui du macronisme qui bien sûr applique le principe connu : diviser pour régner. Le premier séparatisme est le sien, celui d’un bloc qui a une longueur d’avance, et se replie sur ses zones « exclusives » on dit aux Amériques. Guilluy a raison les gens ordinaires existent mais pour gagner il leur faut inventer le moyen d’un autre mode de production, de consommation, de vie. La référence au Brexit n’est pas de nature à me convaincre mais à convaincre plutôt la frange extrême-droite. Je ne crois absolument pas, comme le bloc macroniste le répète, que Guilluy soit un homme d’extrême-droite mais dans son appel au renversement du système il est impératif d’analyser avec sérieux (je veux dire sans la réduire à un fascisme quelconque) cette tendance au repli, sous peine d’échouer comme l’a fait Chévènement, Podemos et d’autres. Il s'agit d'une bataille sur le long terme pour constituer le squelette d'un autre type d'organisation : démocratique, social, créatif. JPD

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