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Vie de La Brochure
17 février 2021

Mort de Raymond Lévesque

Des trois Félix Leclerc, Gilles Vigneault, Raymond Lévesque j’ai toujours eu une préférence pour ce dernier. Je ne sais pourquoi. Je reprends cet article de La Croix car il me semble le plus original quand les autres se sont contentés de la reprise d’une dépêche de l’AFP. Mais avant un petit poème de cet artiste.

raymond lévesque

 TITANIC

Drapé dans son orgueil,

Le monstre d'acier

S'avance dans la nuit,

Invincible.

Survint la masse de glace

Qui l'écrasa comme fétu de paille.

1912.

Comme un avertissement

À la suite orgueilleuse

De l'orgie technique

Qui se brisera contre

Les forces de la nature

Raymond Lévesque

(dans un recueil de 1989)

 Article de La Croix

Jean-Claude Raspiengeas, le 17/02/2021 à 14:57

Le 13 août 1974, pour « la Francofête », à la fin du spectacle J’ai vu le loup, le renard et le lion, les trois géants de la chanson québécoise – Félix Leclerc, Gilles Vigneault et Robert Charlebois – entonnent ensemble «Quand les hommes vivront d’amour/Il n’y aura plus de misère », devant une foule de 120 000 spectateurs. Un record, du jamais vu. Les acclamations fusent. Briquets allumés dans l’obscurité, le public «embarqué» accompagne le trio qui reprend le couplet, en guise de rappels. Le souvenir de ce moment historique perdure encore aujourd’hui. L’album de ce concert de légende se vendra pendant des décennies, conservé comme une relique.

L’idée de chanter cet hymne pacifique avait été suggérée, l’après-midi même pendant les répétitions, par la femme de Gilles Vigneault, comme l’apothéose de cette nuit d’été qui les réunissait tous les trois pour la première fois. Ce soir-là, Raymond Lévesque n’est pas présent sur les plaines d’Abraham. Il se produit, de l’autre côté du Saint-Laurent, à quelques encablures de Québec, sur l’île d’Orléans. Il n’apprendra que le lendemain l’intensité de la ferveur générale et bientôt la trace durable que va laisser l’empreinte de sa chanson. Elle sera reprise dans le monde entier, dans toutes les langues. Même le compositeur de musique contemporaine Philip Glass brodera sur cette mélodie.

Écrite d’un seul jet, à Paris, un matin de 1956

Étrange destin pour ce fils d’éditeur, né le 7 octobre 1928, artiste d’une grande humilité qui aura composé plus de 500 chansons et restera dans la postérité pour ce titre, magnifique, bouleversant, écrit à Paris en 1956, en pleine guerre d’Algérie. Un soir, après une discussion arrosée, une phrase lui trotte dans la tête : « Quand les hommes vivront d’amour. » Il s’empresse de la noter sur son paquet de cigarettes. Au réveil, le lendemain matin, il compose d’un seul jet ce classique qui traverse les générations et fera sa gloire. « Quand les hommes vivront d’amour/Ce sera la paix sur la terre/Les soldats seront troubadours/Mais nous nous serons morts, mon frère. » Jamais une œuvre ne lui était venue aussi aisément. Elle éclipsera et recouvrira l’ensemble de son répertoire.

Raymond Lévesque avait débuté, en 1947, dans des cabarets de Montréal par des imitations de Charles Trénet, son grand inspirateur, avant de se lancer dans la composition et l’interprétation à une époque où la chanson québécoise balbutie encore, dans l’ombre écrasante de la chanson française. « Je me serais écouté au début, disait-il, je me serais foutu hors de la scène. » Plus tard, Raymond Lévesque sera salué par ses pairs comme un pionnier.

En 1954, il tente sa chance en France, dans le sillage de Félix Leclerc. Il part pour trois mois, il y restera cinq ans. Il écume les cabarets de la rive gauche, côtoie Edith Piaf, rencontre Eddie Barclay, fait la connaissance d’Eddy Constantine pour lequel il écrit Les Trottoirs. C’est Eddy Constantine qui, le premier, chantera Quand les hommes vivront d’amour, avant que son créateur l’enregistre dans un album.

De retour au Québec, Raymond Lévesque enchaîne les spectacles dans « les boîtes à chanson » qui fleurissent et révèlent les talents locaux. Gilles Vigneault aimait à dire : « Raymond a ouvert des chemins en raquette où nous passons aujourd’hui en voiture. Il nous a montré comment faire. » Jusqu’à cette nuit du 13 août 1974 où son nom éclate aux yeux du monde.

Humaniste et militant indépendantiste

Pianiste, animateur de radio et de télévision, homme de théâtre, acteur dans une série de films québécois, l’humaniste Raymond Lévesque se mêle, avec ardeur et fureur, au combat indépendantiste. Devenu sourd, dans le milieu des années 1980, il se consacre à l’écriture. Jusqu’à ses derniers jours.

Toujours étonné par sa bonne fortune et la reconnaissance populaire, Raymond Lévesque ne s’accordait qu’une seule qualité, l’endurance, et un seul mérite, avoir tenu bon. Jusqu’à ce que le Covid-19 lui enlève tout et l’emporte dans la mort.

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