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Vie de La Brochure
22 février 2021

Michéa et le sport

Un journaliste des Inrocks est allé interroger Michéa au sujet du sport. Je reprends la partie accessible sur internet pour prolonger les questions de mon article précédent même si elles portent peu sur l'alliance possible entre Messi et Spinoza et même si au trio Camus, les Pasolini ou les Jorge Semprun j'aurai remplacé Semprun par Vazquez Montalban ou Soriano. J-P Damaggio . 

Jean-Claude Michéa : “Le mépris du football est le signe d’une véritable infirmité intellectuelle !”

Julien Rebucci - 18/05/14 10h28

Philosophe, Jean-Claude Michéa est loin de passer la main quand il est question de ballon rond. Témoin son dernier livre « Le plus beau but est une passe » (ed.Flammarion). Délaissant son côté gauche, et dragué par le flanc droit, Michéa fonce droit au but, sans jamais être hors-jeu. Interview.

 Comment vous est venue l'idée de faire un livre sur le football ?

 Jean-Claude Michéa – L’idée de rassembler mes textes sur le football est surtout venue – Mondial oblige – de mon éditeur ! Mais je l’ai évidemment acceptée de bonne grâce. Il faut dire qu’à l’inverse de tous ceux qui se demandent encore comment il est possible de s’intéresser à la fois à Spinoza et à Lionel Messi, j’aurais plutôt tendance, pour ma part, à voir dans le mépris du football le signe d’une véritable infirmité intellectuelle ! Ce n’est bien sûr là – j’en suis parfaitement conscient – que la forme symétrique du préjugé intellectuel dominant. Et qui doit sans doute beaucoup au fait que j’ai été élevé dans un milieu où l’intérêt pour le sport était la chose du monde la mieux partagée (mon père était journaliste sportif à L’Humanité et rédacteur en chef de Miroir du cyclisme). Il reste qu’en un double entretien de Xavi et d’Iniesta récemment (dans Sofoot numéro 115, ndlr), je me suis encore surpris à penser que bien peu d’intellectuels de métier seraient capables, aujourd’hui, d’une telle humanité et d’une telle profondeur de pensée. Comme vous le voyez, mon “populisme” est décidément incorrigible !

 Quel rôle a joué la victoire de la France en 1998, sur la perception du football par l'élite socioculturelle ?

 La victoire de 1998 a certainement joué un rôle dans le nouveau regard porté par une partie de l’élite intellectuelle et artistique sur le football (jusque là, les Camus, les Pasolini ou les Jorge Semprun étaient clairement des exceptions). Mais bien moindre, toutefois, que l’arrêt Bosman, en 1995. C’est surtout, en effet, à partir de cet arrêt imposé à l’UEFA par la Cour de justice européenne – arrêt qui permettait de lever les derniers obstacles juridiques à l’introduction de la “concurrence libre et non faussée” dans le monde du football européen – que le montant des transferts a commencé à atteindre un niveau surréaliste et que l’image des stars du football en est venue, en conséquence, à changer du tout au tout. Dès lors, en effet, que ces stars pouvaient s’offrir “une Rolex avant 50 ans”, poser dans des clips publicitaires ou sortir avec des top models, plus rien ne s’opposait à ce qu’elles soient désormais célébrées par Le Grand Journal de Canal Plus. Reste à savoir si cette consécration du football par le monde de l’élite et des privilégiés repose sur une véritable connaissance du jeu. On peut aussi en douter.

 Comment expliquez-vous le manque de spectacle souvent décrié et dénoncé dans le football français. Ses critiques peuvent-elles être mises en lien avec un manque de connaissance des élites dirigeantes du football de l'histoire de ce sport ?

 La pauvreté du spectacle offert par la Ligue 1 tient précisément à cette intégration croissante du football moderne dans la logique de l’économie de marché. D’une part, en effet, la plupart des clubs français – à l’exception du PSG et de Monaco – sont de moins en moins capables de conserver leurs meilleurs joueurs d’une saison sur l’autre, y compris ceux qu’ils ont eux-mêmes formés. Et de l’autre, les intérêts économiques en jeu font qu’une descente en Ligue 2, ou une absence prolongée au niveau européen  peuvent aujourd’hui avoir des conséquences très graves sur l’équilibre financier, et donc sur la survie sportive de ces clubs. Personne n’a évidemment envie de connaître le sort du Racing club de Strasbourg par exemple (le club a été mis en liquidation judiciaire et a perdu son statut professionnel pour raisons financières en août 2011 – ndlr).

 C’est pourquoi, de nos jours, la grande majorité des équipes entrent sur le terrain avec pour seule idée en tête de ne pas perdre, tout en tablant sur les contres et les coups de pied arrêtés pour espérer inscrire un but.

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