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Vie de La Brochure
2 mai 2021

Vázquez Montalbán et la politique

Gamin, j’en connais un qui est tombé dans le chaudron de potion magique.

Gamin, ce ne fut pas original, je suis tombé dans le chaudron de la politique.

J’en ai connu un dans le même cas en 1924. Enthousiasmé par la victoire du cartel des gauches il a été si déçu ensuite qu’il est devenu apolitique.

Parce que les idéaux que l’on a à 20 ans ne se réalisent pas, faut-il devenir blasé à 70 ?

C’est une question que se pose MVM dans trois histoires qu’il a jugé bon de doter d’une préface. Si MVM a écrit des dizaines de préfaces pour d’autres, pour ses œuvres je ne connais que celle-ci mais je n’ai pas vérifié. Ce texte de 1987 est déjà comme un bilan de sa vie. J-P Damaggio

  HISTOIRES DE POLITIQUE FICTION

Le personnage de Carvalho est né dans un roman qu'on pourrait ranger dans la catégorie de la « politique fiction », à supposer qu'une telle marchandise existe dans le catalogue littéraire. Mon oeuvre romanesque, dont le cycle Carvalho n'est qu'une partie, commence avec un roman de politique fiction supposée (Recordando a Dardé), et la mise en fiction de situations "politiques", apparaît dans Happy End, ou dans Questiones marxistas, ou dans Assassinat au Comité central, ou encore dans Le Pianiste. La politique est un ingrédient de ma vie, de ma mémoire et de l'histoire, et mes romans-chroniques tendent à la reconnaître comme un ingrédient littéraire.

Les trois histoires de politique fiction que je propose dans le présent volume ancrent dans l'époque contemporaine, à côté du thème toujours présent et obsessionnel du « coup d'Etat » à l'espagnole, une mémoire politique commune qui devient le détonateur de drames actuels, à la manière d'une bombe à retardement continuant à menacer, au-delà du temps, ceux qui la détiennent. Dans « Federico III de Castille et León », une tentative de régicide sert de prétexte pour décrire l'actuelle Espagne occulte de l'extrême droite nostalgique, en contrepoint avec le pathétique utopisme de Federico III, le pauvre et vieil aspirant à un trône impossible.

Dans « La guerre civile n'est pas finie » s'accomplit un règlement de comptes annoncé... il y a plus de quarante ans, presque cinquante. Annoncé par l'orgueil et la passion que les acteurs de la guerre civile mirent dans leur pari contre le destin, individuel et collectif.

Dans « Un certain 23 février », un détonateur contemporain agite la boue de la peur civile de l'Espagne en guerre et offre à Carvalho une enquête sur un cas de perversion des sentiments différée, la vengeance de bourreaux implacables et bêtes qui, en leur temps, furent les victimes d'une histoire qui les dépassait. Je ne cache pas ma croyance, si évidente dans Le Pianiste, que les générations qui vécurent la guerre civile espagnole acquirent une stature polysémique sans équivalent en ces temps de survivants sans espoir.

Mon ami Doménech Font m'a fait un jour remarquer que ces trois histoires paraissent être consacrées à ce secteur social euphémiquement appelé « troisième âge ». Les vieux sont des condamnés à mort qui n'attendent plus le coup de téléphone du gouverneur qui commuera leur peine. Aussi bien leur rage que leur sincérité me semblent des valeurs intellectuelles de première grandeur.

Manuel Vázquez Montalbán.

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