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Vie de La Brochure
28 juin 2021

Les pourris et les abstentionnistes

Les soirs d’élection les pyromanes se font pompiers et tentent, sur les plateaux télés, de verser des tonnes de larmes pour éteindre d‘incendie. Et quand un journaliste demande à un pourri de service s’il n y’ a pas un échec de son côté, il répond sèchement : Ne vous en déplaise j’ai gagné ! Puis il contrattaque et ajoute : Et la responsabilité des médias dans l'abstention ?

Et bien non, je ne vais pas parler des abstentionnistes mais, pour me soulager, de ceux qui pendant des décennies sont allés voter, c’est-à-dire de la France civique.

Comment expliquer la naissance d’un grand civisme (aux USA cette abstention est chronique depuis toujours) en France ou en Italie faisant dire qu’il s’agissait de pays politiques ?

En 1935 dans la toute petit commune qui est la mienne c’est un maire socialiste qui a été élu et dans la circonscription c’est un député socialiste qui a gagné en 1936. Les partis politiques structuraient le pays. Pas toujours pour des bonnes raisons car les pourris d’aujourd’hui ont très souvent de grands ancêtres mais les partis formaient les citoyens, par exemple dans des réunions contradictoires de haute tenue même si parfois la violence était au rendez-vous.

Cette situation a duré et a même été relancée par les combats de la Résistance. De Gaulle a cru qu’il pouvait gouverner au-dessus des partis, puis il a découvert qu’il lui fallait créer son propre parti. Il échoua car il ne peut y avoir un parti au-dessus des partis.

Et cette France des partis dont il avait horreur l’appela au secours en 1958 dans le cadre d’un coup d’Etat. Il tira les leçons et créa cette fois un parti parmi les partis mais dans le cadre d’une constitution nouvelle qu’il nous a laissé en héritage, une constitution si souple qu’elle a permis la victoire d’un président anti-de-gaulle, la victoire encore du ventre mou du pays !

Que s’est-il passé ? Comment le civisme a été mis à mal ?

Avec la 5ème République De Gaule a voulu mettre face à face la droite et la gauche pour réduire les partis à deux partis comme dans la plupart des autres pays européens (démocratie chrétienne contre communistes en Italie, travaillistes contre conservateurs en Grande Bretagne, démocrates contre républicains aux USA etc.). J'ai même cru que la France tomberait dans le bi-partisme.

L’affrontement droite-gauche a renforcé le civisme car il y avait possibilité d’alternative et l’alternative a gagné en 1981 dans le cadre d’une constitution dont on pensait qu’elle rendait impossible cette victoire.

Et c’est là que le civisme en a pris un grand coup pour plusieurs raisons. Effondrement de l’URSS, victoire de Reagan et l’impossible alternative n’était plus l’effet d’une constitution mais l’effet d’une configuration mondiale !

Et en Italie d’abord, en France ensuite ce sont les partis politiques eux-mêmes qui se mirent à scier la branche sur laquelle ils étaient assis, en se faisant les promoteurs de l’apolitisme. Et le sommet de l’édifice et apparu quand il a été décidé d’abord en Italie puis en France que l’Etat allait financer les partis politiques ! Loi typique car au nom du bien public il s’agissait de tuer le bien public ! Et c’est cette stratégie qui a permis l’élection d’un président sans parti ! Le « en même temps » n’est rien d’autre que la capacité à proposer le mieux, en produisant le pire !

Par le financement public des partis, le simple citoyen devenait nuisible pour la classe dirigeante, à plusieurs titres, dont le fait majeur qu’il avait tendance à mettre son nez dans les affaires du pays, ce qui le constituait en homme ou femme (avec beaucoup de retard en France) politique.

Le civisme n’est pas tué par cette simple loi si peu étudiée par nos chers médias qui préfèrent parler du salaire des élus jugé plus ou moins haut. Cette simple loi n’est d’ailleurs par la cause mais l’effet d’une situation sociale plus large, celle de l’atomisation généralisée.

Dans cette France civique que j’évoquais, d’ailleurs sans nostalgie, il y avait beaucoup de corporatisme et les corps empêchaient l’atomisation. J’ai bien connu le corporatisme des instits car le monde des instits avait été conçu comme un corporatisme face à celui de l’Eglise. Il y avait celui des cheminots, etc.

C’est la gauche qui a tué ce corporatisme en supprimant le système Ecole Normale sans rien de sérieux pour le remplacer comme le PCF a supprimé la référence à la dictature du prolétariat sans rien de sérieux pour la remplacer.

L’atomisation sociale ne s’est pas seulement traduit en multiplication des chapelles politiques mais en multiplication des chapelles au sein même des grands partis ! Et en face on a droit au développement de tous les communautarismes possibes, à toutes les sectes du ciel et de la terre.

Ces chapelles ont pu mettre en place un « entre soi » qui a réduit la classe politique comme peau de chagrin (et chagrin est un mot bien modeste).

Nous sommes passés d’un temps ou peuple politique et classe politique vivaient en symbiose (et je ne dis pas qu’il y avait moins de pourris qu’aujourd’hui), à un temps sans citoyens possibles.

Mais alors cette démocratie répétée malade n’est-ce pas le retour d’un fascisme plus ou moins nouveau dont le RN serait seulement la partie émergée ?

N’oublions jamais que si le capitalisme a été conduit, à un moment, à inventer le fascisme pour solutionner la crise de la démocratie, ce fait n’a pas été aussi universel que le capitalisme lui-même ! Quand l’Allemagne se précipite sur la France, ce ne fut pas seulement une guerre entre impérialismes. !

Aujourd’hui, pour s’éviter de penser la nouvelle configuration politique et sociale, on ressort les recettes du passé ou alors on invoque la proche fin du monde au nom de toutes les urgences cumulées.

Je n’écris pas qu’il n’y a rien à apprendre de l’histoire, pour conjurer les maux d’aujourd’hui –et ma passion pour la question est bien connue- je dis que tout ce qui alimente les malentendus conduit à des impasses. Quand les mêmes qui tuent les citoyens pour se partager le gâteau entre quelques initiés, invoquent ensuite la démocratie participative comme solution, c’est à mourir de rire, et leurs larmes de crocodiles sur l’abstention est de même nature que leurs infamies quotidiennes.

Non je ne dis pas « tous pourris » mais ceux qui sont sur les plateaux-télés le sont tous car ils y sont invités par leurs semblables. J-P Damaggio

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