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Vie de La Brochure
10 juillet 2021

Le corps en révolution

La lecture de mes propos est déroutante car très souvent j’utilise la conclusion en guise d’introduction ce qui bien sûr rend la suite des premières lignes moins nécessaire, alors que dans le même temps la conclusion apparaît peu compréhensible.

Le rugby n’est qu’un effet et vu l’engagement total des corps qu’il représente la question première est bien celle des corps.

Dans un premier temps le corps fut pour les gens de peu (les intellectuels passent vite de peu à peuple) leur seule source économique de vie. L’esprit n’était pas absent mais un supplétif du corps par le moyen de la religion. Il fallait prier la pluie pour que les corps agricoles limitent leurs souffrances. L’esprit n’a pu se libérer partiellement de la religion que le jour où, par l’industrie, les corps sont devenus secondaires économiquement. Le symbole final de cette mutation s’appelle le tracteur du paysan. Il n’est plus à trimer derrière la charrue mais domine sur son tracteur la charrue derrière lui. Le tracteur, fruit de l’intelligence humaine, change la nature du corps.

Le corps était le seul capital des gens de peu, mais un corps à part entière ; il devient un corps partiel adapté aux gestes imposés par les machines. Le sport fut le seul moyen de retrouver un corps humain aussi peu surprenant s’il se développe au pays par excellence de l’intelligence industrielle.

Il a fallu qu’un Communard, Paschal Grousset, condamné à Cayenne, s’évade du bagne, se réfugie à Londres pour y devenir un admirateur de la gymnastique et de l’éducation (révolutionné elle-même) jusqu’à l’introduire en France avec les sports complémentaires. Et voilà comment quelques années après c’est un Français qui relance les Jeux Olympiques !

La France classique que la Commune voulait mettre à bas avait institué un fossé entre le corps et l’esprit. Vallès voulait le rompre en faisant de la géomètrie la porte d'entrée aux mathématiques.

Le corps pour les gens humbles ; l’esprit pour les élites élus de dieu ou d’autres. Le corps comme unique source de joie des uns ; l’esprit comme source de toutes les joies pour les autres. Ne nous y trompons pas, le corps vassal de l’esprit religieux avait aussi ses joies propres.

Toute une philosophie victimaire va réduire le sport aux jeux du cirque chers aux autorités romaines. Or les jeux du cirque et les jeux du stade sont radicalement différents, sauf pour qui veut tout réduire au public qui applaudit.

Quelle différence radicale entre une corrida, ce vestige des jeux du cirque, et un match de foot ? D’un côté, un animal mort, et pas de l’autre ? Dans une corrida tous les spectateurs connaissent la fin (avec quelques exceptions), mais pas dans un match de foot ! Dans une corrida les spectateurs sont là pour "apprécier" «l’art» d’arriver au résultat attendu, et si le torero sort blessé, il aura gâché le spectacle. Dans un match de foot (ou de rugby) pour les spectateurs la durée est connue à l’avance mais le résultat est incertain. La manière devient parfois secondaire sauf pour des perdants qui prétendent, à titre de compensation, avoir eue l’élégance pour eux quand le camp d'en face a joué comme des brutes, la fin justifiant les moyens.

Les champions d’une philosophie victimaire, champions souvent en marxisme de salon oublient systématiquement que le capitalisme en développant une exploitation de l’homme par l’homme, développe ainsi les forces sociales capables de le renverser ! Et si depuis des décennies ces forces ne réussissent pas à renverser la table, la pire des choses consiste à oublier ou nier leur existence pour le plus grand bien du capitalisme lui-même.

Quel rapport avec le sport ? Le capitalisme ne le crée pas en tant que nouvel opium du peuple (la religion existait avant lui et existera après lui) , mais y est contraint, par ses besoins professionnels d’êtres nouveaux où le corps se plie non à la nature (comme pour le paysan) mais à la machine donc à l’intelligence d’autres hommes ! Le marxisme de salon ne retient chez Marx qu’un aspect de la religion (l’opium) oubliant qu’il célèbre aussi son action de consolation. Une consolation permettant justement l’opium ? C’est alors faire peu de cas du besoin réel de consolation chez tout humain ! Ne confondons pas le besoin réel et sa «manipulation» !

Une bonne part du peuple suit le sport pour se dire que tout n’est pas écrit à l’avance, que David peut vaincre Goliath ! Ne me répondez pas qu’à la fin c’est toujours l’argent qui gagne car tout le monde sait qu’il y a des exceptions, celles qui prouvent en fait qu’une révolution est possible. Oui, je sais, le sport n’est que course à la réussite, nationalisme, hooliganisme, marchandisation, dopage, corruption, le tout habillé par des mythes dont je risque de me faire le relais. Les révolutions ne sont pas des mythes même celles qui mangent leurs auteurs !

Capitalisme ou pas, le sport est devenu nécessaire par plusieurs sentiers, à commencer par celui du soin à apporter aux corps (méprisé par les purs esprits), par le besoin d'une équipe qui ne soit pas seulement une addition d’individus mais un collectif efficace, et enfin par l’incertitude du résultat s’opposant au pouvoir de droit divin écrivant tout à l’avance.

Les philosophies victimaires le sont car elles enfoncent des portes ouvertes : bien sûr que le sport est marqué par les tares du capitalisme, il n’y a là rien d’original.

Au milieu d’une forêt poussent des champignons, un constat ayant ses mérites, mais après le constat, l’avenir, puisqu’il existe un avenir, je le cherche en trouvant des cèpes.

Le prochain roman de Padura parle d’un jeune cubain rêvant de devenir un grand joueur de beisbol, (je l’écris à l’espagnole) et assez malin pour aller aux USA. D’ailleurs, notons en passant, que Cuba n’a jamais eu une grande équipe de foot car bien que pays, par excellence, opposé à l‘impérialisme US, le sport qui reste roi est celui… de l’impérialisme US ! Un Cubain voulant devenir un grand musicien, un grand jouer de beisbol, etc. c’est un cubain qui veut réussir. Que le capitalisme ait besoin de développer l’envie de réussir pour le manipuler, n'efface pas une réalité humaine allant au-delà du capitalisme lui-même, et loin du mythe ! Oui Hitler a manipulé à son avantage les Jeux Olympiques et les Jeux par eux-mêmes permettaient cette manipulation, sauf que l’histoire ne s’arrête pas là ! Je ne peux toute l’écrire en quelques mots. Juste ce constant : l’incertitude du résultat d’un match fait de 'avenir une incertitude. L'intelligence humaine a pris le pouvoir sur les corps sauf que la dite intelligence reste une petite part du corps ! JPD

P.S. La même histoire est celle qui va séparer la procréation de la sexualité.

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