Le paysan et l’anticipation

Hier j’étais chez ma mère où nous bavardions, quand mon cousin est arrivé pour relancer les bavardages. A un moment ma mère a expliqué qu’elle aime bien être prévenue à l’avance avant de se lancer dans une action pour pouvoir se préparer. Mon cousin lui a alors fait remarquer que pour une maraichère il n’y a rien de plus nécessaire. Oui, un paysan a toujours dû anticiper et parfois longtemps à l’avance. C’est un point sur lequel j’ai si souvent insisté. Aussi, quand les paysans étaient le quotidien de la grande masse des français, cette culture de l’anticipation était générale car la culture paysanne irriguait toute la société.

A la campagne quelle différence entre élever des poulets et des bœufs ? Le temps mis pour « la récolte » ! Si les seuls critères de rentabilité existaient il ne faudrait qu’élever des poulets. Or, avec le capitalisme, le temps est devenu de l’argent. 

Les banquiers ont observé que les Français sont peu friands d’investissements boursiers, préférant la sécurité des plans d’épargne de grands-mères. Bien sûr, l’argent de leur épargne est cependant placé en bourse mais s’il y a perte elle ne concerne pas le client… et s’il y a gains pour la banque elle ne le concerne pas non plus.

C’est l’écrivain Virilio qui s’est penché sur l’étude de la vitesse dans nos sociétés mais plus sur la vitesse en soi, que sur la vitesse vecteur du capitalisme et agent de la mort de la culture paysanne, qui est bien plus que la mort des paysans.

Il est incontestablement fascinant d’appuyer sur un bouton qui aussitôt vous éclaire la pièce et la téléphonie mobile permet dans l’instant d’organiser une rencontre.

Sauf que derrière tout l’appareillage électronique il faut des hommes et des femmes champions en anticipation car champions en programmation.

Autour des années 1985 un petit robot avait été fabriqué pour les écoles, la tortue Logo. Il fallait mettre au point des programmes pour la diriger. Rien à voir avec le pilotage en direct d’une voiture télécommandée. L’anticipation par l’intelligence. Les programmeurs sont les plus grands anticipateurs si bien d’ailleurs, que, par les algorithmes, ils peuvent piéger les utilisateurs en les conduisant aux conclusions qui leur conviennent. Une note juste en passant. J-P Damaggio

Après l’invention de l’agriculture, l’invention du numérique est devenue le plus grand laboratoire de l’anticipation. Mais qui commande les programmeurs ? Ce ne sont pas les besoins alimentaires !