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Vie de La Brochure
17 avril 2023

Michel Clouscard sur l'Humanité en 2005

Michel Clouscard que je défends depuis 1980 a trouvé en cette maison d'édition Delga des défenseurs courageux et je salue cette présence sur l'Humanité. JP Damaggio

 

clouscard-marianne-idees

L’Humanité 16 novembre 2005

Critique du libéralisme libertaire, généalogie de la contre-révolution,

par Michel Clouscard, Éditions Delga, 2005,

384 pages, 22 euros.

L’apparition d'un nouveau concept comme celui de « libéralisme libertaire » est un événement dans la pensée. Mais le processus par lequel le monde universitaire le valide ou non comme sien dure assez longtemps. Michel Clouscard est le premier à avoir employé le terme « libéral (donc libertaire) » dans son livre Néo-fascisme et idéologie du désir en 1973. Il en révèle les racines philosophiques profondes dans l’'Etre et le Code (1973), procès de production d'un ensemble précapitaliste. A la différence des idéologues structuralistes de l’époque, il propose un ensemble logico- historique qui, sans exclure le marxisme, saisit la quotidienneté et le langage de tous pour aboutir, comme écrit Sartre à propos de l’ouvrage, à ce que « l'Histoire se révèle concrètement pour ce qu’elle est, une totalisation en cours ».

L’événement initial de cette «critique» courageusement rééditée dans une version actualisée par les jeunes éditions Delga, se situe en mai 1968. La révolte estudiantine, amplifiée par la longue grève ouvrière, fut considérée par l’auteur comme le cheval de Troie du libéralisme libertaire. Thèse surprenante sur le moment mais compréhensible de nos jours si l’on observe ce que sont devenus les pseudo-«héros» estudiantins et leurs slogans réutilisés sans honte aucune par le «marketing» moderne. L’esprit soixante-huitard a même pénétré le «management» des entreprises. On peut donc dire rétrospectivement que ces événements sont à l’origine de la plus accomplie des contre-révolutions. Cela ne signifie pas, bien sûr, que Michel Clouscard ait jamais considéré comme négligeables les indéniables avancées sociales obtenues par le mouvement. Mais l’articulation interne au capitalisme de l’idéologie libertaire jusqu'alors marginale et de la structure libérale de la société s’en trouva durablement confortée. Néanmoins c’est en mai 68 que se joua le grand socio-drame nécessaire au déblocage des marchés du désir, rendu urgent par la crise commençante du capitalisme et le plancher atteint alors par la baisse tendancielle du taux de profit. Pouvoir capitaliste et discours libertaire sont désormais deux pôles de la pensée libérale contemporaine. Le premier domine, le second assure cette domination : « Avec le libertaire, le libéralisme accomplit son concept» (p. 230). Contrairement à l’euphorie euphonique qu’il suggère le libéralisme libertaire ne libère personne. C’est une stratégie qui permet l’engendrement réciproque du permissif et du répressif, permissif pour le consommateur s’il en a les moyens et répressif dans tous les cas pour le producteur. Le devenir de l’expression dissimule mal l’impossible passage de la société de production à la société de consommation dans le cadre du capitalisme.

 L’ouvrage porte modestement en sous-titre Généalogie de la contre-révolution. C’est en fait d’une biographie philosophique qu’il s’agit où, partant des fondements de la Révolution française établis par Rousseau et Kant, en particulier l’engendrement réciproque de la conscience et de la connaissance, il montre comment la logique du libéralisme mène à la destruction de la raison dialectique, anéantissement qui est l’une des caractéristiques les plus néfastes de l’époque que nous vivons. Si Rousseau a critiqué les Lumières, c'est au nom même des Lumières et pour atteindre une meilleure rationalité, moins encyclopédique, moins mécanique et plus démocratique. Si Clouscard a dénoncé la bureaucratie, c’est-à-dire le règne, que ce soit à l’Est ou à l'Ouest, des moyens qui finissent par se prendre eux-mêmes pour leur propre fin, c’est pour proposer une philosophie qui mette le marxisme à l’heure des sociétés dites «postindustrielles» et pour fonder une stratégie pluraliste d'ouverture et d'auto-organisation. L'inverse du désenchantement auquel aboutit le libéralisme libertaire. Arnaud Spire

• Rendez-vous. Michel Clouscard et son collaborateur Dominique Pagani participent aujourd’hui à 20 heures, à un « Débat sur le libéralisme libertaire » à l’École normale supérieure, 46, rue d'Ulm à Paris.

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Commentaires
L
Comme toujours tu es très bien informé avec l'humour qui va avec, car je n'avais pas noté cette présence. Donc merci pour la précision.
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G
Je ne sais pas si les éditions Delga ont un rapport avec la présidente de la région Occitanie mais ce qui est certain c'est qu'elles publient les textes négationnistes (j'emploie le mot à dessein) des staliniens du PRCF.
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