Le silo de Beaumont de Lomagne

Les silos sont un patrimoine étrange: marquant le paysage dans lequel ils s'inscrivent comme autant de doigts levés vers le ciel, ils sont chargés d’une histoire récente mais visuellement forte, que traduisent les choix architecturaux et les étapes de construction. Ils n’ont pas encore mobilisé comme on pourrait s’y attendre les historiens, les géographes, les économistes aussi je vais m contenter d’une évocation brève.

Bien sûr les silos ont traversé tous les temps et tous les lieux mais ici il s’agit des silos à blé nés autour des années 1930 avec pour notre région le modèle du silo d’Ondes dans la Haute Garonne.

En Tarn-et-Garonne c’est Moissac qui va donner l’exemple en 1934.

Grâce au Front populaire Beaumont viendra ensuite avec une construction en béton entre 1937 et 1938.

La loi du 15 août 1936 tendant à l'institution d'un Office National interprofessionnel du blé, a créé dans chaque département un Comité d’organisation (en Tarn-et-Garonne sa direction est étrange).

Aussitôt après, l'arrêté du 12 septembre 1936 fixe le taux des subventions concernant les installations coopératives à 20%. Toutefois, pour les silos et magasins à blé, le taux est fixé au tiers des dépenses. De plus, aux termes de l'arrêté du 12 novembre 1936, les Sociétés coopératives agricoles peuvent recevoir des subventions complémentaires lorsqu'elles couvrent leurs dépenses d'installation au moyen de souscriptions locales. Ces souscriptions peuvent être constituées soit uniquement sous forme de parts sociales, soit à la fois sous forme de parts sociales et sous forme d'emprunts recueillis auprès des particuliers. Le montant des subventions complémentaires est fixé au quart de ces souscriptions locales, leur maximum étant limité au 15% des dépenses subventionnables.

C’est ainsi que le projet de Beaumont st retenu.

En janvier 1937 le rapport du Conseil général indique :

« Depuis notre dernier rapport ont été subventionnés et sont en cours d'exécution les travaux de construction d'un magasin à blé annexé aux silos de Moissac et d'installation d'un pont-bascule à Mas-Grenier.

En outre, sont à l'étude des projets de silos à blé à Beaumont-de-Lomagne, Larrazet, Montech, de coopérative de boulangerie et de ponts-bascules à Septfonds et Caussade. »

Le rapport du 1^er janvier 1939 au Conseil général indique :

« Depuis la publication de notre dernier rapport ont été exécutés les travaux de construction de silos à blé d'une capacité de 30.000 quintaux à Beaumont-de-Lomagne, d'un magasin à céréales à Larrazet, d'une boulangerie coopérative à Lafitte, d'un pont-bascule à Mas Grenier. »

En avril 1939 en réponse à un vœu pour élargir l’office du blé M. Roques indique :

Il est incontestable que l'Office du Blé a rendu d'appréciables services aux producteurs; il faut certainement le maintenir, mais le faire rentrer dans le cadre professionnel, en y introduisant certaines modalités nouvelles qui rendront son fonctionnement plus souple et surtout moins onéreux pour les finances publiques. C'est un fait, d’autre part, que le prix actuel du blé serait bien inférieur si ce n’était Office du Blé. Pour être objectifs, nous devons même rappeler certaines pratiques qui avaient lieu sur le marché du blé avant l’institution de l'Office.

Quand nous voulions vendre une partie de cette céréale, l'acheteur nous répondait souvent avec un semblant de mystère : « Hier, le blé a baissé ou a augmenté de deux points à Chicago », et il nous fallait subir la loi de l'étranger et des spéculateurs internationaux.

C'était arbitraire au premier chef. N'oublions pas, Messieurs, que les lois économiques qui nous régissent sont le fait de quelques hommes.

Voyez-vous, nous croyons connaître toutes les forces de notre planète et nous ignorons les plus redoutables d'entr'elles. Elles sont aux mains de 7 ou 8 hommes, dont la foule serait bien embarrassée de dire les noms et qui, plus puissants que les plus grands capitaines, détiennent le sort du monde.

Je ne veux pas introduire la politique dans ce débat qui doit rester purement économique ; mais je ne puis approuver des spéculations de ce genre.

Votre 4e Commission demande donc le maintien de l'Office du Blé.

Par contre, la Commission repousse énergiquement l'organisation d'un Office des Céréales secondaires. »

Voilà un petit tour autour du silo de Beaumont que je complèterai à l’occasion. J-P Damaggio

P.S. Sur la photo je suis à côté de mon père devant le silo de Beaumont qu'il a voulu aller voir en souvenir de mon grand-père qui participa à sa construction.