Castelsarrasin : Passerat et la Saint Alpinien
N’ayant pu participer à la conférence de Jordi Passerat je reprends le compte-rendu publié sur le bulletin de l’ASPC que l’on peut retrouver en entier sur le site internet de l’association. JPD
Pour cette nouvelle conférence consacrée à Saint Alpinien, Jordi Passerat, devant un public nombreux et passionné, a choisi de répondre à deux interrogations : qui est cet Alpinien et pourquoi est-il devenu le saint patron de Castelsarrasin ?
Alpinien et Austriclinien étaient deux compagnons de l’apôtre des Gaules saint Martial (premier évêque de Limoges) venus vers le milieu du IIIe siècle évangéliser l’Aquitaine. On ne peut rien dire de plus sur la vie de saint Alpinien, il fut un prêtre qui accompagna saint Martial et il fut enterré à ses côtés dans une église de Limoges, devenue un lieu de pèlerinage fameux.
Au moment des invasions normandes, vers 850, on transporta le corps de saint Martial avec celui d’Alpinien dans une abbaye de Ruffec en Charente. Plus tard, entre l’an Mil et les années 1200, furent inventées des légendes autour de la vie de saint Martial et de ses deux compagnons, Austriclinien et Alpinien. On a voulu faire de ces trois évangélisateurs des proches de saint Pierre et on écrivit un vrai roman à dormir debout pour les identifier avec des personnages des Evangiles.
C’est avec son humour habituel que Jordi Passerat nous assure que tout cela est pure invention et qu’il faut donc reconnaître humblement que l’on ne sait rien sur la vie de saint Alpinien. Cependant, sur place, à Castelsarrasin on peut parler longuement du culte qui lui fut réservé.
Il semble que l’on peut dater le transfert des reliques de ce saint dans la cité fondée par les comtes de Toulouse au milieu du 12e siècle, au moment où l’on agrandit l’église Saint-Sauveur, et où l’édifice gothique que nous contemplons aujourd’hui fut achevé entre 1255 et 1260. Les abbés de Moissac étaient prieurs du lieu et Bertrand de Montaigu, qui dirigea l’abbaye clunisienne de 1260 à 1295, eut sûrement l’idée, pour asseoir leur puissance, de faire venir des reliques pour favoriser l’apport de dons en vue de l’œuvre de la construction d’une nouvelle église. On parle des ossements conservés alors dans un magnifique reliquaire en argent. Il existe à ce sujet une véritable tradition orale, sous forme de récits de miracles et de contes merveilleux, qui racontent comment les reliques du saint sont arrivées mystérieusement sur les rives de la Garonne. Tantôt on parle d’un enfant qui voit un baril flotter dans la mare où il conduit son troupeau d’oies, tantôt on parle d’un bœuf qui indique la cachette du baril contenant les reliques au milieu d’une rivière. Tous ces récits pieux et populaires visent à glorifier les restes du saint protecteur de la cité conservés dans le reliquaire de la chapelle Saint-Alpinien à l’église Saint-Sauveur de Castelsarrasin.
Mais, comme s’interroge le conférencier, ces légendes ont elles vocation à être vraies ? Elles servent principalement à transmettre des valeurs, préserver la mémoire collective et enrichir l'héritage culturel, qu'elles soient fondées sur des faits réels ou fictifs. Au moment des troubles de la Révolution il fallut cacher le précieux reliquaire en argent, on dut en fabriquer un nouveau, celui qui est visible aujourd’hui, qui fut confectionné en 1823, en imitant l’ancien reliquaire d’argent. Il ne subsiste à l’intérieur que trois os : l’os de la hanche droite, une côte et l’humérus du bras gauche, conservé dans un reliquaire en forme de bras levé. La ville n’a cessé, durant 700 ans, de vouer un culte à saint Alpinien et la fête locale (aux environs du 26 avril) est l’occasion de le célébrer l’ors de processions transportant une châsse contenant ses reliques à travers la ville,