Sabinus Valière en 1927
A défendre Claire Valière, il me reste à chercher qui était son célèbre mari. Voici ici une de ses actions qui nous rappellent qu’il fut aux côtés des pacifistes en 1914-1918. Les fusillés de Flirey sont quatre soldats fusillés pour l'exemple pendant la Première Guerre mondiale. Le caporal Antoine Morange, les soldats Félix Baudy, François Fontanaud et Henri Prébost, incorporés au 63e RI, 5e Cie, ont été fusillés pour l'exemple le 20 avril 1915 à Flirey puis réhabilités en 1934. J-P Damaggio
P.S. Le même jour, sur ce journal, une caricature de Léon Blum.
Le Rappel 30 mars 1927
AU PALAIS-BOURBON
La réhabilitation des fusillés de Flirey
On a évoqué hier à la Chambre le drame de Flirey.
On connaît les faits. En 1917 [où 1915 ?], sur un verdict inique d'un conseil de guerre, quatre soldats du 63° d'infanterie, innocents de tous crimes, ont été passés par les armes.
Depuis dix ans, la Ligue des Droits de l'homme, les anciens du 63e, l'A.R.A.C., plusieurs associations d'anciens combattants luttent en vain pour arracher aux tribunaux la réhabilitation de ces victimes de la « justice » militaire.
M. Valière, député socialiste de la Haute-Vienne, a porté l'affaire à la tribune du Parlement. Loyalement, il a sollicité le concours du garde des sceaux pour surmonter les obstacles que rencontrent les réhabilitations des victimes de Flirey. M. Valière a évoqué les témoignages des anciens du -63° qui, dernièrement, ont voté un ordre du jour déclarant «que les fusillés de Flirey sont morts au champ d'honneur au même titre que leurs camarades frappés par des balles allemandes». Devant un tel témoignage, que peuvent peser des décisions de justice ?
A ce propos, l'orateur rappelle, la récente décision de la Cour de cassation qui a repoussé la demande en réhabilitation. La Cour a jugé en vertu d'une loi que l'orateur savait mauvaise : puisqu'elle est esclave des textes, il faut modifier ceux-ci afin de mettre la conscience des juges à l'abri.
M. Valière indique que le garde des sceaux a dans la mesure de ses moyens, déjà réparé, mais qu'aujourd'hui la justice ayant prononcé, il ne peut aller plus loin. Pourquoi, dans ces conditions, ne pas créer des tribunaux spéciaux composés d'anciens combattants et de magistrats de carrière qui évoqueront les affaires comme celle-ci, rechercheront les responsabilités, et se prononceront souverainement. Un texte de ce genre a été déposé par l'orateur, puis retiré. Mais après avoir inutilement attendu que justice soit rendue, il déclare qu'il veut aujourd'hui mener son devoir jusqu'au bout.
M. Valière. — Les anciens combattants sont décidés à poursuivre leur besogne de réhabilitation. Je compte sur le gouvernement pour chercher un moyen d'arriver à la réparation totale. Si on la leur accorde, ils ne demanderont pas vengeance.
De chaleureux applaudissements saluent la péroraison de l'orateur socialiste, et la parole est à M. Barthou, garde des sceaux.
Le ministre de la justice répond à M. Valière que s'il dépose à nouveau sa proposition de loi le débat qui s'ouvrira permettra de discuter la question avec toute l'ampleur nécessaire. Mais, pour l'instant, on se trouve en présence d'un arrêt de la Cour de cassation. La question est de savoir s'il reste au garde des sceaux un moyen de remettre cet arrêt en cause. Il a fait, à cet égard, tout ce que lui permettait la loi : la procédure qui y est indiquée a été scrupuleusement suivie. En particulier, la Cour de cassation, toutes chambres réunies a jugé souverainement et statué comme juridiction de jugement, sur le fond même de l'affaire.
M. Barthou. — Dans ces conditions, que puis-je faire ? apporter mon opinion personnelle ? je n'en n'ai pas le droit. ! pas plus que je n'ai le droit de discuter l'affaire ! A l'heure actuelle je suis désarmé. Le jour où viendra en discussion la proposition de loi de M. Valière, le gouvernement donnera son opinion : d'ici là, il lui est Impossible de fournir de réponse autre que celle qu'il a apportée ici, car il ne peut que faire appliquer la loi.
A bas les conseils de guerre ! lancent des voix d'extrême-gauche, et l'incident est clos.