Chili : Voici cinquante ans je débutais ma vie d’instit (1)

En septembre 1973 je débutais ma vie d’instit à Lauzerte, au collège, dans une classe de 5éme de Transition, type de classe dont, en deux ans de formation professionnelle, je n’avais jamais entendu parler… Ma compagne d’alors était en classe de perfectionnement et nous occupions un logement de fonction un peu spartiate.

Le 12 septembre en écoutant la radio, comme tous les matins, à 8 h j’ai appris le fameux coup d’Etat. En partant je me suis arrêté chez le marchand de journaux, juste à côté pour acheter l’Humanité. Le titre était rassurant. J’ai toujours collectionné des articles pour mieux suivre les événements aussi mon dossier Chili est devenu très fourni avec même un voyage au Chili bien plus tard dont ce blog témoigne. Je viens de jeter à la poubelle ceux sur La Pologne, L’Iran, Le Nicaragua, L’Afghanistan, mais je ne vais jamais jeter celui sur le Chili. La question chilienne était, dès 1970 une question majeure pour la révolution par les urnes.

Du coup d’Etat, le Parti communiste Italien va en tirer des conséquences majeures : la démocratie chrétienne qui était la droite chilienne était aussi la droite italienne or dans le rapport des forces il fallait tenter un rapprochement pour éviter le pire.

Du coup d’Etat, le Parti communiste français a pu dire qu’il en avait tiré les conséquences avant qu’il ne se produise en signant un programme commun avec le PS en 1972 et en septembre 1973 les regards étaient braqués sur la santé de Pompidou. A sa mort en 1974 Mitterrand est redevenu le candidat unique de la gauche.

Mais au-delà, de cette question, le coup d’Etat au Chili a obligé les forces démocratiques à reconsidérer le rapport des forces. Les années 1960 et 1970 furent des années très contradictoires avec des victoires progressistes et des victoires réactionnaires. Les historiens ne peuvent rendre compte des ambiances mais elles existent. Il y a cinquante ans nous dirons que le symbole c’est d’un côté la victoire des Vietnamiens, mais qui ne peut faire oublier les massacres de Vietnamiens. Les Talibans afghans se glorifient d’avoir vaincu l’armée des USA, mais la victoire des communistes vietnamiens a aussi existé dans un contexte si différent, puisque les Afghans gagnèrent seuls quand les Vietnamiens gagnèrent avec appui de l’URSS.

Cette époque contradictoire des années 60-70 nous l’avons connu aussi en 68 avec des victoires démocratiques mais avec tout autant de douches froides : élections françaises de juin, intervention militaire en Tchécoslovaquie.

Je ne vais pas aligner les exemples pour en revenir au Chili : les merveilles des gouvernements Allende, le massacre le 11 septembre et les années qui suivirent.

Avec Castro et Cuba, l’Amérique latine avait alimenté les rêves de révolutions. Avec Allende et le Chili ce fut un enterrement en grande pompe et ceux qui en tirèrent le plus de leçons sont les forces capitalistes. Certains ont pensé que la défaite des USA au Vietnam c’était un coup dur pour le pays mais il n’en fut rien ! Je travaillais à ce moment là dans le pays et les pouvoirs en tirèrent vive les conséquences : il appartenait au capitalisme de se révolutionner !

Marx a bien pointé les contradictions du capitalisme qui annonçaient le socialisme, mais il a moins pointé que les dites contradictions lui permettaient aussi de se régénérer ! Le capitalisme apprend beaucoup plus de ses défaites que le «socialisme» qui s’était mis en place depuis 1917. La lutte des classes était devenue : souplesse contre rigidité, et la rigidité conduit à la cassure.

Le cas chilien avaient mis de la souplesse dans le combat révolutionnaire mais la souplesse le rend fragile ! Bilan : suite à une négociation avec Pinochet le dirigeant communiste Luis Corvalan pourra échapper à la mort en rejoignant l’URSS. Je vais dévopper la question chilienne en dix messages.

J-P Damaggio