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Vie de La Brochure
17 février 2024

Gérard Barray, Un Belmondo occitan ?

san antonio

Pour la mort de Gérard Barray je reprends cet article ancien. JPD

Le 10 janvier 2009, la Compagnie des écrivains du 82, comme elle le fait chaque année, organisait une rencontre entre une personnalité et son public. Gérard Barray était l’invité que les lecteurs du Florilège publié en 2007 par l’association (ecrivains 82 ) avaient pu découvrir : l’acteur y avait tissé quelques lignes à la gloire de sa ville, Montauban, qu’il écrit « Mountalba ».

 C’est la ville de sa mère où il débarqua à l’âge de quatre ans, au moment de la séparation de ses parents vers 1935.

 Le public put d’abord découvrir l’immense émotion qui secouait l’acteur en découvrant autour de lui tant de souvenirs vivants, tant d’affections partagées.

 Après diverses présentations par Norbert Sabatié, André Serres et d’autres, incapable de faire un discours il préféra le jeu des questions/réponses où, par contre, il ne manqua pas d’anecdotes à raconter.

 La première question tourna autour de ce choix de comédien qui n’était pas naturel pour un jeune que tout destinait à la médecine. Il donna quelques raisons en précisant qu’il allait mentir par omission car l’histoire aurait été trop longue.

 Etudiant à Toulouse, il décida un beau matin d’aller voir une amie de sa mère pour lui dire : « je veux devenir comédien ». Après quelques rencontres, des professionnels l’incitèrent à « monter » à Paris en lui donnant quelques adresses. Fort de ces recommandations, il s’installa dans la capitale et rencontra des metteurs en scène. Il eut droit à cette réponse : « Vous avez un accent « impossible » mais vous êtes sympathique, je vous garde ». J’ai mis impossible entre guillemets car le mot peut varier. Simplement, il avait ce problème de l’accent ! Au cours de la discussion, il avouera avec modestie ne pas avoir eu conscience alors, que son atout majeur c’était son physique. De bonne fortune en bonne fortune, Gérard Barray est devenu un acteur de cinéma de premier plan en jouant dans les films de cape et d’épée le rôle de d’Artagnan ou dans un autre registre, en jouant le rôle de San Antonio.

 A écouter le personnage on a la sensation qu’il ne connut que la chance pourtant, à un moment, il décida de tout arrêter et de partir vivre une retraite tranquille en Espagne avec sa compagne d’origine espagnole. A le voir, à l’entendre, ses 76 ans ne seraient pas un handicap pour jouer encore les premiers rôles mais après une « première qualité de vie » en temps qu’acteur, il opta pour une nouvelle qualité de vie au soleil.

 Le côté franc et direct des échanges permit de mieux comprendre le choix de Gérard Barray. En effet le hasard a voulu que Roland Garrigues, l’ancien maire de Montauban, actuellement conseiller général, ait été accouché par la mère de Gérard (ou la grand-mère je ne me souviens plus) qui était sage-femme… un premier janvier ce qui a dû casser un réveillon indique plus ou moins précisément l’élu, or dans une intervention suivante, une personne rappela qu’en effet, le 31 décembre, c’était grande fête familiale avec les enfants qui… jouaient une pièce de théâtre, par exemple, une parodie d’Hernani.

 Le jeune Gérard Barray préféra, en amateur, jouer au musicien, mais on constate que la comédie n’était pas indifférente à sa mère dont, autre souvenir, il joua un texte qu’elle avait écrit, sur la scène du cinéma L’Etoile.

 Pour la musique, Hugues Panassié et sa passion du jazz furent la référence. Depuis 1941 l’homme est installé définitivement à Montauban et le souvenir concerne cette période charnière qui va de 1945 à 1950, à un moment où Panassié est au faîte de sa gloire (il n’a pas quarante ans) et publie un livre par an. Pour rappeler ce moment, André Serres a bien fait les choses : il projette une belle photo montrant cet orchestre de jeunes qui, avec guitare, batterie, piano, a dû faire résonner les notes d’Armstrong et Fats Waller, l’idole de Gérard. A écouter, à voir, toute une vie intellectuelle de la « ville de province » sort des entrailles de briques roses. Pourtant le comédien a du « monter » à Paris pour réussir.

 Sa vie d’acteur lui fit rencontrer des grands de l’histoire française et trois noms seront évoqués, Jean Cocteau, Simone Signoret, Frédéric Darc. Jean Cocteau dont il ne put supporter la direction d’acteur, Simone Signoret dont la générosité lui permit de vivre un grand moment sur la Côte d’Azur et Frédéric Darc qu’il retrouva, coïncidence incroyable, dans la ville de Marbella où il s’était installé, où ils sont tombés dans les bras l’un de l’autre pour ne plus se séparer. Un peu comme si Gérard Barray n’avait rien demandé à la vie qui lui apporta tout sur un plateau elle-même ! A moins qu’il ne s’agisse là que d’un sens de la vie du comédien qui lui fait retenir tout ce qu’elle a de beau, et oublier tous les travers. Peut-être parce que Gérard sait que l’amitié se transmet de génération en génération.

 Dans son petit récit du Florilège qui en appellerait d’autres, il ajoute une note : « Pour tous ceux qui, trop jeunes, l’ignoreraient, mon nom est Baraillé, de occitan « barral » qui signifie barril, tonneau. « Lou barraillé », c’est le tonnelier. Référence à l’occitan que l’occitaniste Norbert Sabatié garda pour la fin de son intervention quand il rappela le titre de son court texte : « Mountalba vilo qu’es tan poulido ». Les adeptes de la graphie normalisée ne lui ont-ils pas reproché le refus de correction, d’autant qu’il fut le maître d’œuvre du livre ? Le respect de la vie doit primer sur le respect de l’orthographe et en cela je suis d’accord avec le choix opéré. Gérard Barray a connu, comme on l’a vu, le Montauban de Panassié beaucoup plus que le Montauban de Perbosc, deux personnalités que Claude Sicre propose depuis tant d’années d’unir, car procédant du même phénomène, construire et vivre une culture en complicité avec les cultures populaires. Un effort auquel je rêve d’apporter aussi ma pierre. Gérard Barray apporta la sienne quand, dans le débat, par un clin d’œil, il fit référence à son ami Gérard Montaut du bazar Montaut. De là, ne peut-on rejoindre la comédie, avec le théâtre occitan si cher à Frédéric Cayrou ?

 11-01-2008 Jean-Paul Damaggio

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