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Vie de La Brochure
11 avril 2020

L’ère de la bourgeoisie numérique

Une fête de Pâques sur Facebook ! Quel romancier  pouvait imaginer un tel événement ? Des commentateurs le répètent ici ou là : le monde après le coronavirus ne sera plus le même sauf que bien souvent le commentateur exprime alors son rêve d’avant la crise ! Comme si le coronavirus permettrait enfin une accusation plus radicale, plus généralisée, plus définitive du capitalisme. Le coronavirus deviendrait l’éclairage inattendu de notre histoire. Par exemple : je lis chez ceux qui rêvent d’un monde multipolaire que la crise va enfin en finir avec la prédominance des USA. Or demain ne sera pas l’après coronavirus mais l’avec coronavirus ! Pas avec la maladie battue mais avec les conséquences de la maladie. Macron a choisi le terme de «guerre» (je ne sais si d’autres dirigeants ont utilisé ce mot) et il est bon de rappeler qu’il n’y a pas eu un avant et un après la Première guerre mondiale, car l’après fut plus marqué par la guerre que par l’avant-guerre.

La maladie va confirmer, amplifier, structurer, le pouvoir de la bourgeoisie numérique (je ne prétends pas que ce soit le bon terme). A mes yeux elle est née avec CNN et est la conséquence directe de la lutte des classes.

Il ne faut jamais oublier qu’aux USA, la classe ouvrière a conduit des luttes mémorables qui lui ont permis d’obtenir un statut enviable, statut qu’à partir des années 1970 les pouvoirs économiques ont décidé de détruire par deux moyens : la délocalisation en Chine de l’Industrie, l’immigration clandestine massive pour les productions non délocalisables. Le poids de cette immigration est apparu au moment d’une immense grève en 2006. La journée sans immigrés a été relancée en février 2017 mais le succès fut faible car dans la nouvelle situation, Trump a su jouer les pauvres (avec papiers) contre les pauvres (sans papiers). D’ailleurs aujourd’hui, ces pauvres là sont les premières victimes de la maladie.

 Dans cette situation nouvelle les maîtres du pays ont investi dans les secteurs de la communication. J’aime pendre l’exemple de Nike qui d’un côté produit industriellement, par ses filiales à l’étranger, et qui aux USA fabrique sa stratégie de communication. Nike c’est en fait, une virgule !

Petit à petit l’idée est née de contrôler le monde par le contrôle et la maîtrise des satellites.

 La classe ouvrière étant à présent désorganisée, Trump a pu donner l’illusion de son retour au premier plan mais avec quels salaires ?

 J’aimerais des reportages sur la reconversion d’une ville comme Rochester quand la pellicule s’est mise à disparaître (on a souvent eu droit à ceux sur Detroit), ville totalement vouée au dieu Kodak. Rochester, une ville où le métro a fonctionné de 1927 à 1956 et où encore en 1975 22 000 personnes travaillaient dans une usine ouverte aux touristes, car elle était comme une ville à visiter en bus. La population est tombée de 320 000 à 200 000. L’entreprise a essayé de renaître pour vivre à l’ère du numérique mais avec grandes difficultés. Bref le numérique a gagné tous les secteurs de la société faisant de l’information (au sens le plus large en incluant la publicité) le pilier de la nouvelle bourgeoisie.

Cette mutation du statut même de l’information (et non de son contenu qui devient un aspect marginal) est rendu visible par le financement des campagnes des élections présidentielles. Les années 2000 constituent un vrai tournant. Jusque là, tous les candidats aux présidentielles acceptaient les fonds publics pour financer leur campagne et étaient donc soumis aux plafonds. En 2008, Barack Obama donne le coup de grâce à cette tendance en décidant de financer sa campagne via des fonds privés (donc sans aide des fonds publics). Il contourne ainsi le fardeau du plafond (84 millions de dollars à l’époque) tout en mobilisant bien plus de fonds privés. La campagne de 2008 dépasse en effet le milliard de dollars de budget ! On peut, en positif, considérer que l’importance de la dépense prouve à ceux qui en doutent, l’importance du politique !

Contre CNN, Chavez a décidé de lancer TeleSur en 2005. L’idée était heureuse (battre l’adversaire sur son propre terrain) sauf que TeleSur devenait une chaîne en continu parmi des centaines en arrivant 10 ans après la chaîne Al Jazeera. Basée à Doha au Qatar, elle est lancée le 1er novembre 1996, par le cheikh Hamad ben Khalifa Al Thani, émir du Qatar, qui vient d'arriver au pouvoir en renversant son père. Elle vise à rompre la mainmise des Saoudiens sur le paysage médiatique international arabe, à briser le contrôle des gouvernements arabes sur l'information nationale et donc à libéraliser le paysage médiatique arabe.

 Dans le monde d’aujourd’hui on assiste donc à un type d’explosion de l’information numérique plus puissant, plus décisif, plus intime. Je me dis que quelque part dans le monde des serveurs doivent chauffer fortement et la prochaine grande maladie sera l’explosion de tels serveurs par les moyens les plus divers et les plus discrets, nous laissant nus face à l’univers. Notre nudité n’étant que l’inverse de l’habillage sophistiqué de la bourgeoisie numérique. J-P Damaggio

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