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Vie de La Brochure
4 mars 2022

1921 : le chapeau de paille dans la tourmente

canotier

Si le capitalisme est en perpétuelle révolution, il existe des constantes bien connues. Celle des profits pour quelques-uns, celle du protectionnisme, celle de la destuction des compétences professionnelles. Avec cet exemple à un tournant de l'histoire, il y a de quoi réfléchir. A partir des années 30 les chapeaux vont quitter les têtes et comment ne pas considérer que son prix a joué un rôle ?

J-P Damaggio. 

La Dépêche 29 mai 1921

A Propos du Chapeau de Paille à 35 francs

 Mon interlocuteur, le maraîcher, qui s'offre avec sérénité - au prix où sont les légumes – des chapeaux  de paille à 35 francs, avait, parait-il choisi son exemple, pour accuser les intermédiaires le tout faire pour la hausse. Mon voisin, le chapelier, m’a dit très irrité : «Une autre fois quand vous voudrez parler chapeaux de paille, ça vous apprendra à vous adresser à un jardinier... ».

 La leçon a porté ses fruits, et j'y ai gagné d’apprendre - espérons que je ne serai pas le seul - que, bien que fabriqués à Caussade, dans la haute vallée de l’Aude, ou ailleurs en France, les chapeaux, dits canotiers, sont tissés non avec de la paille mais avec des assemblages dits « tresses » provenant d'Italie, de Chine et du Japon. Cette importation, grevée, du reste, de droits de douane considérables, a pour résultat de mettre le chapeau de paille hors de prix, autant et plus cher que le chapeau de feutre, à telles enseignes que les marchands chapeliers ont limité leurs achats, hésitant à faire négoce d’une marchandise sur laquelle leurs bénéfices sont des plus réduits, le prix de vente au client dépassant à peine leur prix d’achat en gros. Voici, du reste, la lettre qu'à ce propos, le président du Syndicat des chapeliers détaillants de Toulouse a écrite au président de l’union des syndicats des fabricants de chapeaux de paille de France ;

 « Monsieur le Président,

 « Chargé par le Syndicat des chapeliers de Toulouse, dont je suis le président, je viens vous prier de vouloir bien proposer à tous les fabricants de chapeaux de paille de consentir à leurs clients un rabais de 20 % sur toutes les commandes livrées ou livrables. Je n’ai pas besoin d'insister, pour les raisons que vous connaissez aussi bien que moi, qui m’obligent à demander cette réduction. Nous nous engageons, de notre côté, à faire de gros sacrifices auprès de notre clientèle, à seule fin de favoriser la vente du chapeau de paille et, de ce fait, à aider cette industrie. Il me semble que le chômage pourrait être atténué dans une certaine mesure. Si les fabricants ne consentent pas à ce rabais, la saison d'été sera désastreuse pour tout le monde, et les détaillants se désintéresseront de vendre un article qui leur donne de la perte.  Je vous prie de vouloir bien agréer, etc. »

 Qu'est-ce à dire? Que là aussi, il y a peut-être erreur d'investigations dans les enquêtes économiques. Le bénéfice exagéré n'est pas prélevé par le dernier à vendre, mais quelquefois par le grossiste. Cette augmentation de près d'un tiers sur les prix pratiqués l’an passé, alors qu'on était en droit de s'attendre à la baisse, cette augmentation de 50 % sur les prix de 1914 n'est pas normale. Il y a là certainement une spéculation qui joue, contre laquelle il appartient à l'Etat détendre et le commerce français et le public.

—A. C.

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