Adieu aux Gorbatchev

(photo Nouvelles de Moscou 1er janvier 1992)

Dialogue improbable entre deux amis.

— Pour moi Le moment crucial de ma vie c’est en apprenant le 25 décembre 1991 la démission de Gorby.

— Une démission incompréhensible ! En URSS les chefs d’Etat sont tous morts à leur poste ou victimes d’une révolution de palais. Et il part sans perdre une élection. Il a voulu encore une fois se distinguer ?

— Le 8 décembre 1991 l’URSS cesse d’exister alors son président ne pouvait plus exister ! « Je mets fin à mes fonctions de président de l’URSS. Je prends cette décision pour des raisons de principe ».

— Il aurait pu devenir président de la Fédération de Russie mais peut-être est-ce déchoir ?

— Son combat visait à la construction d’une nouvelle URSS non à sa disparition.

— N’est-ce pas sa politique qui a conduit à ce résultat ?

— Raissa Gorbatchev avait rappelé en avril 1991 : « Le 13 mars 1991 s’est tenu le premier référendum de l’histoire de notre pays. 80 % des citoyens soviétiques inscrits sur les listes électorales sont allés voter pour répondre à la question : « Estimez-vous nécessaire de préserver l’Union des Républiques socialistes soviétiques sous la forme d’une fédération rénovée de républiques souveraines égales dans lesquelles les droits et les libertés des personnes de toutes nationalités seront pleinement garantis ? » 76,4 % d’entre eux ont répondu : « Oui, nous voulons une grande Union soviétique, rénovée et démocratique. »

J’espère et je crois que le peuple soviétique aura la force, la maîtrise de soi, le patriotisme et - ce point est à mon avis très important - le bon sens de surmonter les innombrables difficultés et obstacles jonchant la route qui mène à ce but. J’aimerais que tout en traversant les épreuves de la rénovation, l’Union soviétique reste une union - de peuples, de nationalités et d’idéaux. Nous ne pouvons pas nous permettre d’éparpiller à tous les vents l’expérience morale et sociale inestimable et séculaire constituée par la cohabitation d’un si grand nombre de langues et de peuples et par la coopération entre ces derniers. » N’est-ce pas beau ?

— Certains pensent que c’est justement contre Raïssa que s’unirent ceux qui firent tomber l’URSS ?

— Raissa est morte d’une leucémie en 1999. Elle avait 67 ans et elle fut bien plus que Raissa Gorbatchev. Elle était Raïssa Maximovna Titarenko. Bien que venue de Sibérie elle a peut-être été trop éblouie par l’Europe.

— Mais qui d’après toi a fait tomber l’URSS ?

— Les USA ont protégé leur protégé, Eltsine, et ce dernier a pu attribuer ses échecs à Gorby, et quand à ses succès il n’en a pas eue.

— Pourtant Gorbatchev-Eltsine c’est un couple infernal ?

— Tout s’est joué le 29 mai 1990, quand Eltsine est élu président du Soviet suprême de la République socialiste fédérative soviétique de Russie. Un poste crucial pour que tombe l’URSS et revienne la Russie ! Avec déjà la question de la Crimée ! Un moment qui a son tournant en 1987 dans le cadre des 70 ans de la révolution d’octobre. Un jour je reprendrai le discours prononcé par Georges Marchais à cette occasion. Un chef d’œuvre d’hypocrisie. Georges Marchais avait écrit ses mémoires mais il est mort avant leur publication et le manuscrit est resté au placard.

— Veux-tu me convaincre que Gorbatchev fut un géant ?

— Hélas, j’ai perdu le goût de convaincre.

J-P Damaggio