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Vie de La Brochure
27 août 2023

La grève de 1914 à Castelsarrasin et Raoul Verfeuil

9 juillet

 J’avais promis en juillet 2018 de donner en clair cet article de Raoul Verfeuil. Il n’est pas jamais trop tard pour bien faire. D’autant qu’entre temps j’ai publié un livre sur la vie de Verfeuil. J’indique que la revendication était la même qu’à Graulhet mais contrairement au souhait de Verfeuil elle ne fut pas victorieuse. Observons que ce sont des femmes qui sont condamnées !

Ci-contre c'est la seule autre référence à la grève sur l'Humanité du 9 juillet.

 J-P Damaggio

 

 Humanité 21 juillet 1914

Policiers, et Magistrats de Castelsarrazin s'exercent contre les Grévistes métallurgistes

Castelsarrasin, 20 juillet. (Correspondance particulière.) Le tribunal correctionnel de Castelsarrasin vient de condamner à vingt jours de prison sans sursis deux ouvrières grévistes poursuivies pour entraves à la liberté du travail. Une troisième a été condamnée à trente jours, sans sursis également. Un commerçant qui avait frappé, un jaune s'est vu infliger trois mois, toujours sans sursis. Ces féroces condamnations, réclamées par un procureur autoritaire, violent et vindicatif, appellent l'attention du prolétariat sur cette grève de Castelsarrasin, qui dure depuis le 25 mai dernier, c'est-à-dire depuis bientôt deux mois, et qui semble loin de devoir finir.

La genèse du conflit

Il existe à Castelsarrasin une usine qui appartient à la Compagnie française des métaux. Plusieurs centaines d'ouvriers, hommes et femmes, y sont occupés à fabriquer des cartouches pour le ministère de la guerre. L'usine marche nuit et jour Le travail y est des plus pénibles. Les salaires y sont dérisoires. Quand la grève a éclaté, l'embauche était à trois francs. Ajoutez à cela une direction locale insolente, hautaine et tyrannique, et vous saurez les raisons de la grève. Ce n'est pourtant pas sur ce dernier point que les grévistes ont fait porter leurs revendications. Ils les ont, à dessein, fait porter exclusivement sur la question des salaires. La Compagnie accordait une prime à chacun de ses ouvriers qui effectuait 290 jours de travail, par an. Prime aléatoire s'il en fut puisqu'il n'était tenu compte ni des accidents ni des maladies. Les grévistes ont réclamé son abolition et son remplacement par une augmentation de salaire de 0 fr. 25 par jour sur les petits salaires de 3 fr. 50 à 4 fr. 50. La Compagnie n'a rien voulu entendre, et, à la suite d'une démarche qu'ils ont faite auprès d'elle, les grévistes, dans un esprit de conciliation, ont abandonné la suppression de la prime. Mais ils persistent avec raison à réclamer l'augmentation de 0 fr. 25, qui est des plus légitimes si l'on songe à la nature du travail qu'ils effectuent, au rendement qu'ils sont obligés de fournir, aux bénéfices scandaleux réalisés par la Compagnie et à l'insignifiance du sacrifice pécuniaire qui serait le sien si elle cédait. Il s'agit, en effet, pour elle, d'une dépense quotidienne de 40 francs. Pour quarante francs, elle laisse des centaines de braves gens sur le pavé, et elle perd aussi une somme incalculable. On se demande jusqu'à quel degré de cruauté, d'avarice et aussi d'inconscience peuvent en arriver certains capitalistes quand ils croient défendre leurs coffres-forts !

Vers la victoire malgré tout

Mais la Compagnie française des métaux a beau être soutenue par les pouvoirs publics qui ont envoyé à Castelsarrasin des troupes d'infanterie, de cavalerie et gendarmes, elle a beau faire sabrer la population et faire tirer, de son usine même, des coups de fusil sur les grévistes, elle a beau faire pleuvoir les condamnations sur de braves mères de famille et sur d'inoffensifs commerçants ce ne sont pas ces procédés et le concours d'une douzaine de jaunes qui la sauveront. Il faudra coûte que coûte, qu'elle s'incline devant l'énergie et la volonté du syndicat ouvrier, bien décidé à continuer la lutte jusqu'au bout c'est-à-dire jusqu'à la victoire. La population de Castelsarrasin est tout entière favorable à la grève, que des politiciens locaux ont vainement essayé de canaliser à leur profit. La Compagnie capitulera Et son effondrement sera également celui de ces politiciens qui ont réussi à égarer pour un temps le prolétariat castelsarrasinois. Raoul Verfeuil.

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