Olivier Rey face à J-Cl Caron

Comme tout livre, celui d’Olivier Rey « Quand le monde s’est fait nombre » en croise bien d’autres. Mais il ne croise pas celui de Jean-Claude Caron sur l’Eté rouge de 1841.

Ce dernier livre m’a beaucoup marqué car il évoque des révoltes populaires en dehors des dates classiques 1830 et 1848 pour se finir en fait en une date majeure pour moi, le 2 décembre 1851.

Mais que s’est-il donc passé en France en 1841 ?

Le gouvernement nouveau décide de s’emparer d’une mesure phare : le recensement qui généralement était œuvre municipale mais sans le sérieux mathématique nécessaire. Et la révolte toulousaine va être emblématique puisque le peuple chasse toutes les forces de répression de la ville ! Et pour en rendre compte J-Cl Caron fait référence à Flora Tristan ! Quoi de plus beau ? Je reprends le début de son chapitre :

 « Toulouse la rebelle

De la fin du mois de juin au début du mois d’octobre 1841, le Midi de la France, de l’Atlantique à la Méditerranée, est parcouru par une vague de résistances au recensement qui culmine au mois de juillet à Toulouse. Comme à Clermont-Ferrand deux mois plus tard, la protestation toulousaine dépasse le cadre de l’émeute traditionnelle pour atteindre celui d’une véritable insurrection qui chasse les autorités de la ville (préfet, procureur général, commandant de division militaire) et nécessite l’envoi d'une troupe nombreuse pour rétablir l’ordre. Si le bilan des combats semble assez léger (officiellement, on ne dénombre qu'un mort), la tension née de l'annonce du recensement a révélé l’existence de questions non résolues et réveillé des revendications que l’on croyait éteintes. Lorsque Flora Tristan visite Toulouse en septembre 1844, elle note qu’« il y a entre les autorités et les ouvriers une haine implacable - un défi jeté ! - En 1840 [lire 1841J les ouvriers ont vaincu, ont forcé le procureur général à se sauver comme un voleur - le préfet et les autres. - Et depuis lors l’amour-propre de la boutique préfecture a été profondément blessé - on veut se venger   »[1]. »

 Ce chapitre ne peut que rejoindre le travail d’Olivier Rey qui présente un ouvrage philosophique où il analyse le rôle de la primauté de la statistique au fil des ans, un nombre qui va devenir plus que jamais au cœur du système social. D’un côté l’évolution sociale qui fait que chaque individu est tenu pour absolument singulier. De l’autre tous les individus sont noyés dans le nombre au vu de l’évolution sociale.

Je pointe juste ce croisement qui en recoupe d’autres sans être en mesure d’aller plus loin.

Mais pourquoi une telle révolte contre le recensement ? Car comme le montre admirablement Olivier Rey, le recensement n’est pas seulement une question de nombre ! Recenser se présente très clairement comme un moyen de mieux calculer l’impôt ! J-P Damaggio

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[1] Flora Tristan, Le Tour de France. Journal inédit, 1843-1844, Éditions Tête de Feuilles, 1973, p. 253