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Vie de La Brochure
30 mars 2019

Thomas Bernhard en 1988

Thomas Bernhard est un écrivain et dramaturge autrichien né le 9 février 1931 à Heerlen et mort le 12 février 1989 à Gmunden. Quelques semaines avant sa mort il fait encore l'unanimité contre lui. Un enragé à la lecture si salutaire... J-P Damaggio

Politis 4 novembre 1988

Sa pièce Heldenplatz fait scandale en Autriche

Vienne brûle Thomas Bernhard

 Scandale à Vienne- avant même la première de la nouvelle pièce de Thomas Bernhard, Heldenplatz, qui devrait être présentée à partir du 4 novembre au très officiel Burgtheater. Dans un pays qui se reconnaît massivement dans un président aussi controversé que Kurt Waldheim, Thomas Bernhard et le metteur en scène Claus Peymann ont réussi à réaliser contre eux l'union sacrée de toute la classe politique, y compris les socialistes de Beniit Kreisky. C'est qu'encore une fois, l'écrivain touche là où ça fait mal, avec une extrême violence imprécatoire : il traite du nazisme en Autriche, sujet occulté et refoulé dans ce pays paisible qui ne voudrait pas avoir d'histoire(s).

Heldenplatz (la place des héros) est la place sur laquelle furent triomphalement accueillies à Vienne en mars 1938 les troupes hitlériennes. Cinquante ans plus tard, un professeur de mathématiques qui avait émigré en 1938 se suicide en se jetant par la fenêtre de son appartement qui donnait sur cette fameuse place. Les proches et parents du suicidé parlent de «l'abjecte stupidité» de ce pays comparé à une «scène de théâtre» où tout serait «pourri, putréfié, dépravé » et où il n'y aurait plus que le choix entre des «salauds noirs et des salauds rouges».

La bête immonde serait là, omniprésente, tapie et prête à resurgir à visage découvert. Le national-socialisme serait encore tout-puissant en Autriche et ses habitants n'attendraient plus que le « metteur en scène » qui viendrait ordonner tout ça. Au cours de cette conversation, la femme du professeur ne cesse d'entendre monter la clameur du 15 mars 1938 qui devient de plus en plus forte, jusqu'à l'insupportable. Les extraits publiés dans la presse autrichienne abondent en formules choc d'une rare violence et Thomas Bernhard n'épargne rien ni personne : de Kurt Waldheim, traité notamment de «menteur», au «pseudo socialisme nauséabond » et au catholicisme associé par l'écrivain à cette « maladie contagieuse » qu'est le nazisme. Comme souvent, en pareil cas, les hommes politiques ressortent le vieil argument de l'argent des contribuables et plusieurs acteurs du Burgtheater ont démissionné. Waldheim parle « d'insulte au peuple autrichien » et ce grand défenseur des libertés rappelle doctement qu'il ne faut pas « abuser de la liberté de l'art ».

EUGENE DURIF

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