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Vie de La Brochure
17 janvier 2021

Le concierge de l’Ecole normale

 

le pitou

Venant de ma campagne, à la rentrée 1968, j’ai découvert à l’Ecole normale l’univers des concierges. Au portail, en rentrant à droite, il avait son logement de fonction. Ce n’était pas le seul logement de fonction de l’établissement : en plus de ceux inévitables du directeur et de l’économe il y avait aussi au bout du gymnase celui du chef cuisinier. Combien existe-t-il aujourd’hui en France de logements de fonction ? Avec la perte de ceux des Instits et de ceux des concierges que reste-t-il ?

Ceci étant la découverte restait superficielle. Cette année là l’Ecole normale comme tous les établissements secondaires avait mis en œuvre la mixité dont certains pensèrent qu’elle était un effet de Mai 68 alors qu’elle était le résultat d’une volonté du Général de Gaulle inscrite dans une loi de 1962 (un délais de six ans fut accordé pour la réalisation). Observez en passant que la gauche au pouvoir sous la Quatrième république n'avait pas osé s'attaquer à ce dossier !

Par contre, Mai 68 introduisit de la démocratie avec des délégués élèves dans le conseil d’administration. Elu par ma classe c’est là que j’ai compris l’univers du concierge !

Un lieu commun voudrait que le peuple connaisse la vie, et pas les élites. Or avec le conseil d’administration j’ai pu vérifier que le peuple (ici les élèves) connait la vie qui l’entoure, et que les élites (ici les dirigeants de l’éduction nationale) connaissent la globalité de la vie ! Ce n'est pas connaissance contre ignorance, mais que faire des connaissances de chacun ?

Autour de la table du Conseil d’administration, il y avait les délégués des profs, des élèves… et du personnel «technique». Un élève est surtout au contact des profs, et le personnel de cuisine, de ménage, le jardinier et le concierge, c’est un peu comme le décor. Le concierge était le délégué CGT de ce personnel ouvrier même s’il ne s’agissait pas d’ouvriers d’usine.

Dans cette belle assemblée, j’avais quinze ans et suite à un propos de l’Inspecteur d’académie j’ai mis mon grain de sel dans la discussion, que je ne vais pas détailler ici car la question, c’est le concierge.

On l’appelait le Pitou car nous étions encore dans l’univers des concierges mais aussi dans celui des surnoms. Pourquoi le Pitou ? Peut-être quelqu’un plus âgé que moi à la réponse.

Après le Conseil d’administration il est venu me féliciter pour mon intervention et ça a noué entre nous un lien particulier. Il était à l’image de l’établissement sans que je puisse dire si c’est l’établissement qui avait déteint sur lui ou l’inverse. Un homme paisible. Bien sûr quelques blagues de potaches dont ses enfants pouvaient faire les frais (un ou deux je ne sais plus) auraient pu le faire sortir de ses gonds. Peut-être d’ailleurs est-ce arrivé, mais à mes yeux l’ambiance était toujours bon enfant, et il la symbolisait. Il arrivait que les autorités utilisent, pour la répression, le principe de la colle qui me frappa deux foisn mais toujours dans la bonne humeur.

Le concierge était sans doute la mémoire de l’Ecole normale qu’il a vu mourir à petit feu. Je ne sais s’il a fallu le recycler à la création des IUFM mais je l’avoue, dans une autre vie, j’aurais aimé l’interroger sur sa vie à lui. J-P Damaggio

P.S. C'est par l'intermédiaire de l'amicale des ancien(ne)s de l'E.N. de Montauban que j'ai découvert la photo (et dont je remercie l'action persévérante des responsables) qui dit exactement le personnage, du moins tel que je l'ai connu. La casquette populaire, le tricot sur l'épaule, assis tranquillement, un homme qui symbolise une époque si belle pour moi.

P.S. J'ajoute que j'ai eu le plaisir de croiser sa fille secrétaire de mairie à Bruniquel du temps où j'y habitais et que je faisais quelques recherches dans les archives communales. Elle a pris sa retraite voici peu.

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