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Vie de La Brochure
13 juin 2023

Les vins de Cahors en 1972

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En 1972 il m’arrivait de ne boire que du Cahors. Je ne sais trop pourquoi mais je l'ai un peu oublié. Où en est-il aujourd’hui ? En attendant de répondre voici ce petit tour dans le Lot. J-P Damaggio

 La route du Cahors

Connu depuis les temps les plus anciens, apprécié par François Ier, qui fit planer autour des ses châteaux des ceps quercyrois, le vin ‘e Cahors, qui servit de vin de esse à l’Eglise orthodoxe russe et donna son nom à un vignoble de Crimée, connut son apogée au IXe siècle, avec quarante mille hectares plantés. En 1962, on en rencontre six mille, dont deux mille en appellation contrôlée. Cette lente descente aux enfers et la rénovation de ces dernières années se résument en quelques dates. En 1876, le phylloxera ravage le vignoble. L’exode va fonctionner cent mille habitants pendant cinquante ans. « On monte à Paris » (en 1923, la capitale comptera environ quarante mille Lotois). On s’en va même aux Amériques. La guerre de 1914 viendra encore arracher des centaines de paysans, compromettant la reprise. Puis ce sera la concurrence des vins algériens dans les années trente ; encore une guerre et les gelées de 1956. A ce moment-là, il ne restait plus guère de ce vin que la gloire. Cette splendeur passée s’offre volontiers à celui qui suit la route du vin de Cahors jusqu’à Soturac, à deux pas du Lot-et-Garonne.

Ce sont d’abord les terrasses éboulées qui ponctuent les collines aux environs du chef-lieu, puis encore la ville qui donne son nom au breuvage que le poète Clément Marot baptise « la liqueur de feu ». C’est d’abord le pont Valentré, pont fortifié du XIVe siècle. Jusqu’à Douelle, ancien centre d’embarcation du vin, la route encaissée entre montagne et rivière laisse voir à droite le château de Mercues : enfin s’ouvre vraiment l’aire du vignoble.

D’abord Barnac, son premier haut lieu, avec la cave coopérative « les côtes d’Olt ». L’unique cave, qui représente la moitié de la production d’AOC avec ses cinq cents sociétaires. Le coup d'œil sur les deux millions de bouteilles en vieillissement vaut le détour.

Luzech, un autre haut lieu du vin, semble retirer beaucoup des éboulis à mi-coteaux. Puis Albas, petit bourg resserré sur lui-même, protégé par sa belle falaise. Et puis encore Anglars et Belaye. Du haut de son belvédère on voit se dérouler, loin là-bas, le site de Prayssac, dans la vaste parenthèse d’un méandre du Lot.

Encore un peu de route, au rythme de la rivière qui, pour parcourir un kilomètre, en fait trois au gré de ses boucles ; et on arrive à Pescadoires, à Grezels, enfin à la cité médiévale de Puy-l’Evêque. C’est à deux pas de là que Jean Galbert a décidé d’embouteiller sous son propre nom et de commercialiser lui-même sa production. Comme beaucoup, ici, une petite exploitation de 14 hectares, dont 5 hectares en AOC. Une pluie de récompenses, dont trois médailles d’or ces derniers mois, couronne ses efforts. Il le faut bien car, bon an, mal an, il faut sortir 18 millions de centimes de charges diverses, et aménager un hectare d’AOC revient aux alentours de 6 millions anciens.

Si dans la répartition des lots nouveaux à planter on essaie de privilégier les petits propriétaires, cette renaissance du vin de Cahors ne va pas sans problème. Le capitalisme agraire a été attiré. De véritables affairistes, à la fois producteurs et marchands de vin, sont à l’origine de nouveaux grands domaines qui risquent de modifier dangereusement les structures viticoles, dans un pays de petits et moyens producteurs, et de bouleverser les rapports économiques. Leur puissance leur a permis de rafler des terres et d’acheter les droits de replantation au prix fort. Certains ont même bénéficié de hautes protections politiques pour obtenir des droits gratuits... Et puis, la menace de l’entrée de l’Espagne dans le Marché commun n’arrange pas l’horizon.

L’amateur pourra aussi suivre ces flèches, tout au long du chemin, qui le conduiront de domaine en château à la découverte de ce vin rouge, à la saveur rustique, assez homogène d’un bout à l’autre de son aire d’implantation, partenaire privilégié des gibiers, viandes rouges et fromages.

Certes, tel ou tel terroir contribue à la spécificité de chacun des vins, mais ici pas de hiérarchie des crus, non, mais les nuances viennent souvent des qualités du vigneron.

Christophe JULIEN

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