Lucien Andrieu et la pêche à la grenouille

C’est une gravure sur bois à partir d’un croquis de Lucien Andrieu qui écrit lui-même un texte pour expliquer l’image. Malheureusement le document que j’ai, est sans référence. J-P Damaggio

 La pêche à la grenouille

C'est aux environs de Doullens, que cette pêche tant soit peu bizarre se pratique :

Deux pêcheurs (ce sont presque toujours des enfants), se rendent sur le bord des fossés marécageux : l'un porte un long râteau terminé par une espèce de nasse en filet et l'autre est armé d'un mauvais couteau.

Le premier plonge son instrument dans l'eau et en retire avec la vase et les herbes, des grenouilles au nombre de trois ou quatre, quand le coup de râteau est heureux.

Le second saisit ces poissons d'un nouveau genre, les coupe par le milieu du corps, met la partie postérieure dans un panier et abandonne l'autre moitié; aussi lorsque l'on se promène à cette époque sur le bord des fossés n'est-il pas rare de rencontrer en grand nombre des parties de grenouilles remuant encore.

Rentrés au logis, nos deux pêcheurs emploient leur soirée à dépouiller et à trousser les cuisses, qui ainsi préparées ont une belle couleur blanche et fraîche qui les rend très appétissantes.

Le lendemain, ils promènent leur marchandise de porte en porte, et la vendent le plus souvent à raison de un franc le cent; mais les jours maigres il y a hausse dans les prix, car on ne peut pas contenter tous les amateurs.

On les mange en friture ou au blanc, quelques-uns mêmes en font un excellent potage maigre.

Dans les jours d'heureuse pêche, on peut gagner facilement trois francs par journée.

Ce métier comme beaucoup d'autres a ses ruses, car tous les roseaux retirés de l'eau par le râteau sont ramassés par les pêcheurs et rejetés dans le fossé pour que de nouvelles victimes puissent venir se réfugier dessous.

LUCIEN ANDRIEU.