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Vie de La Brochure
22 mars 2022

Bernard Lubat et le sous-réalisme en 1996

Lubat l'estaminet

Lubat, l’homme de la cultivature, vient d’écrire qu'il faisait partie des attardés de l’arrière-garde, et j’ai senti dans la formule un brin de tristesse, chez ce grand-joyeux, et j’ai été peiné. En période faste il aurait dit : les allumés de l’arrière-garde ou les champions de l’arrière-garde, même si le mot « champion », ce langage sportif, n’est pas dans ses chants.

Il parle sérieux Lubat donc il est bien dans l’arrière-garde c’est-à-dire ceux qui s’accrochent à la manifestation du temps, à la terre méprisée, sauf que dans cette arrière-garde (le pessimisme de l’intelligence), il pousse le bouchon, il arme la paix, il transporte l’humour, il fait voyager la poésie, puisqu’il s’appuie sur l’optimisme de la volonté, sa Compagnie.

Le romancier Ferdinando Camon vient d’employer cette phrase, « optimisme de la volonté et pessimisme de l’intelligence » pour caractériser Sciascia. Son rationalisme c’est le pessimisme de l’intelligence. Pourquoi le pessimisme ? A raisonner on voit bien que l’homme va vers sa mort. La volonté, celle de se battre et Sciascia a été sur tous les fronts.

 Le surréaliste dira : optimisme de l’intelligence et pessimisme de la volonté car son intelligence c’est bien connu FAIT le réel, et s’il y a volonté, elle ne peut être que la manifestation de l’intelligence, au minimum par l’écriture automatique. Le mot prend le dessus sur la chose, il emporte dans les cieux.

 Allier rationalisme ET instinct vital, recul ET engagement etc. ?

Le recul (la distance) face à la vie n’est possible qu’avec l’engagement, et réciproquement.

Le pessimisme n’est pas celui de l’intelligence mais celui de l’intelligence analysant l’optimisme de la volonté.

L’optimisme n’est pas celui de la volonté mais celui lançant l’œuvre du pessimisme de l’intelligence.

Prenons un exemple.

Le surréaliste se lance dans un poème. Génial ce poème ! Il est sorti de sa tête et il se trouve encouragé, pour puiser encore autre chose dans sa tête, puiser jusqu’à épuisement qui sera l’épuisement du sens social.

Le sous-réaliste se lance dans un poème. Génial ce poème ! Il est sorti de son action et se trouve encouragé à agir, qu’importe l’éventuel futur poème. Le sens social est alors un simple commencement, qui laisse à l’autre, l’effort à faire pour le continuer.

Le sous-réalisme est l’action comme critère de la pensée.

Donc dans la phrase de Gramsci « optimisme de la volonté » vient d’abord, puisque tout commence par une action, une action qui ne peut cependant se juger à l’aune de l’action (l’action pour l’action ne vaut pas mieux que l’art pour l’art), d’où l’intervention critique de la pensée, qui ne peut que rendre du pessimisme, avec ou sans rationalisme, puisqu'il y a critique.

Pour revenir à Lubat, où s’articule sa joie dans tout cela ?

Comment le pessimisme, produit par l’intelligence analysant l’action, peut-il se faire joie, et non torture pesante ?

S’il n’y arrive pas à la joie, alors il justifie les cyniques qui disent : pourquoi agir puisque de toute façon chaque action contient son échec ; et les volontaristes qui disent : seule l’action compte car réfléchir bloque l’action en créant une espèce de doute amer.

Or, la joie, la joie du savoir est plus impérieuse que jamais.

La joie du surréaliste se retourne vers lui-même vers sa réussite.

La joie du sous-réaliste est d’un autre ordre. J’ai envie d’écrire elle est l’inattendu (l’improvisation) mais ça ne suffit pas, le sous-réaliste est encore battu.

Il s’agit d'une joie qui ne s’occupe ni de l’échec ni de la réussite, ni de l’optimisme ni du pessimisme, elle est joie en tant qu’artiste tenant l’équilibre sur le fil du cirque. Bien sûr tout le monde ne pouvant être artiste elle va paraître élitiste pourtant non, car tout le monde à son jardin secret, celui où il est artiste et là est la joie, dans l’équilibre retrouvé, celui du cheminot construisant un beau meuble, celui du maçon retapant une vieille voiture, celui du paysan poète. Cette joie est dignité retrouvée grâce aux outils de l’action et de là, critique de l’action. Cette joie, en quittant les rives de l’illusion, produit ce qu’on peut souhaiter de mieux à la joie. J-P Damaggio

P.S. je ne compte plus les références à Lubat sur ce blog.

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