1930 rue Antoine Bourdelle à Paris

La proposition a été retenue. JPD

PROPOSITION Tendant :

1° A donner le nom de rue Antoine-Bourdelle à l'impasse du Maine; S0 A faire apposer sur l'atelier du maître, 6, impasse du Maine, une plaque commémorative, DÉPOSÉE PAR M. Lionel NASTORG,

CONSEILLER MUNICIPAL

 Messieurs, Le samedi 5 octobre 1929, l'impasse du Maine s'emplissait d'une foule énorme venant apporter à Antoine Bourdelle un dernier hommage.

Le Gouvernement avait délégué, pour le représenter à cette cérémonie d'adieu, M. le Sous-Secrétaire d'Etat aux Beaux-arts et l'élite intellectuelle et artistique communiait dans une même et douloureuse émotion : un grand maître de la sculpture venait de disparaître.

A côté des personnages officiels et des représentants de tous les groupements d'art, les habitants de l'avenue du Maine, ses voisins, qui avaient su apprécier la souriante bonté de l'artiste, n'essayaient point de cacher leur simple douleur.

Ils se rappelaient entre eux que c'est là qu'il avait vécu et travaillé pendant près de quarante-cinq ans, que c'est de là qu'étaient partis, comme aujourd'hui, les convois de tous ceux qu'il avait aimés : de sa grand-mère, de son père et de sa mère, et qu'enfin, fidèle à l'amour qu il avait voué à ce coin de Paris, c'est là qu'il avait tenu à être ramené avant de gagner le champ du repos.

Il appartint alors à M. François-Poncet d'exalter l'œuvre du sculpteur : « Nous ne saluons pas, dit-il, nous ne pleurons pas seulement, en la personne d'Antoine Bourdelle, un maître-ouvrier, l'un des plus éminents sculpteurs de l'époque contemporaine. En un temps où l'Art s'énerve, se disperse en mille productions, sans doute ingénieuses et subtiles, mais parfois menues et chétives, nous nous inclinons de tout notre respect devant l'un de ceux qui ont le plus sûrement mérité le titre de « Grand ».

« Antoine Bourdelle portait les marques du génie. On le sentait habité par cette force étrange qui emprunte les humains de son choix et les soulève au delà des limites ordinaires pour les établir sur des sommets rayonnants.

« L'esprit, qui souffle où il veut, avait soufflé sur lui. Il lui avait dispensé tous les dons. En ferait-il un musicien, un peintre, un poète? Musicien, peintre, poète, penseur, architecte, Bourdelle fut tout à la fois, en étant sculpteur. »

 Il convenait qu'on rappelât encore qu'il avait aimé Paris de toute son âme, s'indignant qu'on négligeât de faire de notre capitale « la ville la plus émouvante du monde ».

Honorer le souvenir d'Antoine Bourdelle, comme furent et demeurent honorés déjà, dans ce même 15e arrondissement, ceux de Falguière et de Dalou, ce sera, une fois de plus, honorer, comme il mérite de l'être, le génie sculptural français.

Nous vous demandons donc, en conséquence, de vouloir bien adopter la délibération suivante :

« Le Conseil,

« Sur la proposition de M. Lionel Nastorg, « Délibère :

« Le nom de rue Antoine-Bourdelle sera donné à l'impasse du Maine.

« Une plaque sera apposée sur l'atelier sis impasse du Maine, n° 6, où furent conçues et réalisées les œuvres du maître pendant près de quarante-cinq ans. »

Paris, le 26 juillet 1930.

LIONEL NASTORG.