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Vie de La Brochure
3 novembre 2023

Norbert Sabatié-Drouilhet sur Le Petit Journal

Norbert SABATIÉ est depuis le début aux côtés de Jean-Claude Drouilhet et son texte publié sur Le Petit Journal est parfait. JPD

 

Un éclaireur en fraternité nous a quittés

 Quoi de plus banal que de vouloir raconter l’histoire d’une vie ?  Mais quoi de moins banal lorsque cette vie est faite de passions, d’émotions et de multiples rebondissements ?

Le destin de Jean-Claude DROUILHET était clairement affiché et devait se dérouler comme celui de nombreux jeunes gens de sa génération. Après quatre ans d ‘Ecole Normale, il allait se retrouver instituteur dans un petit village du Tarn-et-Garonne.

Dès 1955, ce sont deux ans d’exercice de pédagogie pratique et concrète qui lui permettent de découvrir les difficultés d’enseigner à des enfants de 6 à 11 ans et de se poser déjà des questions essentielles sur l’art de transmettre des connaissances !

Ce début de carrière est interrompu par sa décision de mettre fin à son sursis militaire afin de se ‘’débarrasser’’ au plus vite de cette obligation citoyenne.  

C’est le commencement de l’aventure algérienne ! Soldat de seconde classe dans un bataillon situé dans les Aurès, l’autorité militaire va utiliser ses compétences en lui demandant d’enseigner en plein bled, véritable pionnier dans un monde qu’il découvre ! Il a devant lui quatre-vingt garçons à qui il doit révéler l’existence des Gaulois et leur  faire chanter ‘’La Marseillaise’’… Les souvenirs de cette période se sont envolés, d’autant plus que Jean-Claude restera longtemps marqué par ce séjour forcé de l’autre côté de la Méditerranée… L’oubli et le déni, thérapies de ce qu’on a appelé hypocritement : les  ‘’événements d’Algérie’’...

De retour en métropole, il enseigne les sciences de la vie et de la terre dans un collège montalbanais… Loin de la routine et du conventionnel, il est toujours en recherche, en expérimentation pédagogique… Laissant libre cours à son imagination, le lancement d’une radio en milieu scolaire, dans les années 1980, n’est pas la moindre de ses réussites (Radio-Récré allait permettre à certains élèves de se révéler et prendre conscience de leurs compétences).  Quand il quitte la vie dite active, le voilà qui joint l’histoire et l’occitan et créera l’association OK-OC, en souvenir de l’extraordinaire voyage accompli par trois Indiens d’Amérique, perdus dans un improbable périple qui s’achèvera à Montauban en 1829.

Trente ans après l’Algérie, l’Afrique allait de nouveau, se rappeler au bon souvenir de Jean-Claude. Proche, depuis quelques années, de sa filleule adoptive rwandaise dont il suivait à distance les études, le génocide des Tutsis le frappe en plein cœur.  Il se rend au Rwanda dans les années qui suivent le massacre. En compagnie de son amie rwandaise il se retrouve au cœur de quelques sites de l’horreur… Seule consolation, la visite d’une école et le contact avec les enfants : retour à l’espoir, retour à la vie… Les enfants sont l’avenir des hommes !

Et que retenir de l’expérience acquise auprès des Amérindiens dont Monique, l’épouse de Jean-Claude, disparue voilà deux ans déjà, avait découvert l’épisode du passage de trois Osages à Montauban dans un Historama ? Ce fut la nouvelle passion de l’enseignant désormais retraité, jusqu’à constituer l’association Oklahoma-Occitania, dans un premier temps basée à Lafrançaise, puis à Montauban où le chemin du Coteau a vite constitué le siège, tellement l’accueil était toujours chaleureux, devenant même un lieu de passage privilégié pour tous ceux qui venaient d’Oklahoma.

Suite à la prise en charge de 42 Osages durant quinze jours de l’été 1990 pour leur faire apprécier le Tarn-et-Garonne et la région, ce fut le tour de 37 membres de l’association à être invités en Oklahoma l’été suivant, pour découvrir les pures traditions amérindiennes dont les danses traditionnelles alors qu’elles étaient privées. L’organisateur de ces premiers échanges n’était autre que Jean-Claude qui a cru bon de s’investir personnellement par la suite pour transmettre des messages de fraternité de nos élus aux représentants de la Nation osage. Parallèlement des échanges scolaires sont nés, puis d’autres manifestations (talk shows, projections, expositions…) qui ont conduit au jumelage entre Montauban et Pawhuska où a été érigée une structure similaire à celle du Rond des Osages de Montauban… L’été indien était bien marqué en Occitanie : alors que l’année 1992 commémorait les 500 ans de la découverte de l’Amérique, Montauban réunissait douze représentant(e)s de tribus indiennes et valorisait les cultures supposées mineures ! Est-il nécessaire d’ajouter qu’en Jean-Claude se manifestaient les valeurs occitanes qui avaient imprégné sa jeunesse et qu’il les retransmettait tout naturellement par la langue et les chansons ? Non sans quelque pointe d’humour…

Depuis, les échanges n’ont jamais cessé, allant jusqu’à mettre en valeur certaines similitudes historiques (relations état/région), linguistiques (enseignement des langues occitane et osage) et traditions diverses (artisanat, vêtements, arts), convivialité et gastronomie n’étant pas oubliées. L’opportunité cinématographique parachevait le tout avec la sortie de deux films cet automne : « Killers of the Flower Moon » de Scorsese qui révèle les assassinats d’Osages des années 1920 et « Un pont par-dessus l’Océan » du Toulousain Francis Fourcou qui établit un parallèle entre la Nation Osage et l’Occitanie.

Jean-Claude n’a eu de cesse de mettre en scène tout cela par le biais du  blog « oklahoccitania » qui retrace les grandes avancées de l’association comme celle des « dons de terre » (au Jardin des Plantes de Montauban et une douzaine d’autres lieux  en Occitanie). Tout dernièrement, sa réflexion portait sur ce que la démocratie devait aux Indiens d’Amérique : beaucoup plus qu’on ne croit ! Saluons sa clairvoyance et son engagement pour une fraternité entre les peuples, en même temps que sa générosité et son envie d’accomplissement des projets qu’il savait faire partager à merveille.

« Une vie ne vaut rien, mais rien ne vaut une vie » quand elle a été utile aux autres et qu’on s’est toujours efforcé de lui donner un sens, le sens de l’humain…                                                                              

 Norbert SABATIÉ Octobre 2023

 

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