Alma de Le Clézio
Je ne suis pas un grand lecteur de Le Clézio mais mon intérêt pour l’île Maurice m’obligeait à lire son dernier roman, Alma.
J’ai déjà évoqué la question à partir d’un lettre qu’il écrivit à l’auteur d’un livre sur l’esclavage à l’île Maurice. En 1991, Karl Noël a publié «L’esclavage à l’isle de France de 1715 à 1810» et sur l’édition d’occasion que je possède, une feuille a été agrafée, une lettre de Le Clézio qui félicite l’auteur en juin 1992.
Ce livre est parmi les références fournies avec Alma et j’ai tendance à penser que le roman est né de cette lecture.
Un roman sur l’île Maurice, plus exactement sur l’oubli à l’île Maurice ou même les divers oublis du lieu.
Peut-être que tous les pays portent en eux une forte dose d’oubli, comme tous les individus, mais tous les oublis ne conduisent pas aux mêmes douleurs.
J’ai retenue cette phrase :
«L’oubli a recouvert cette île, l’a enveloppé d’une membrane souple et laiteuse d’illusion.»
La tâche originelle de l’île se lit dans les multiples noms de lieu qui font référence à des camps : Camp créole, Roches, Diable, Carrol, Thorel, Benoit, Fouquereaux etc.
Et le lecteur devine peut-être la relation avec l’esclavage : il s’agissait de camps d’esclaves.
Je n’ai pas lu les autres livres de Le Clézio sur l’île Maurice comme Chercheur d’or mais les comptes-rendus ne parlent pas de l’obsession qui hante Alma : l’esclavage. Idem pour Voyage à Rodrigues.
Avec l’âge, Le Clézio semble revenir sur cette part d’oubli qu’est l’esclavage. Pas pour pleurer mais pour vivre au contraire. Le livre étant une suite de portraits il n’y a pas beaucoup de suspens mais le suspens c’est l’île elle-même où est passé Conrad mais aussi Baudelaire.
Il en ressort cette question : qui ne peut-on pas rencontrer à l’île Maurice ? Presque la terre entière s’y retrouve. J-P Damaggio