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Vie de La Brochure
25 mai 2019

Le Clézio, le dodo et Mon Désert

 

Mon Desert

 

Dans son roman Alma que j’ai évoqué au sujet de la présence de l’esclavage, Le Clézio se sert du dodo comme fil conducteur à cause d’un souvenir d’enfance :

 « Un jour, longtemps après, j'ai osé demander à mon père : « Ce caillou rond, qu'est-ce que c'est ? » À ma grande surprise, lui qui ne parlait pas, surtout pas de son passé, s'est confié d'un coup : « Tu ne devines pas ? Je vais te dire ce que c'est. J'avais dix ans à peu près, j'ai trouvé ce caillou au milieu des champs de cannes, du côté de Mahébourg, au sud. On venait de faire la coupe, je marchais dans les cannes au hasard, mon père était allé voir quelqu'un à l'usine de Mon Désert, et j'ai vu ce caillou blanc qui brillait sur la terre rouge, entre les débris des cannes. Je l'ai rapporté pour le montrer à mon père, et dans l'usine un ingénieur a regardé le caillou et il m'a dit : "Tu as trouvé un objet rare, c'est la pierre de gésier d'un dodo. Tu vois sa taille, son poids, tu peux imaginer la taille de l'oiseau qui portait cette pierre dans sa gorge." »

À partir de cet instant, j'ai su que cette pierre ronde aurait sa place dans ma vie, et quand mon père est mort, ç'a été la seule chose que j'ai gardée. Ma mère a fait le choix d'entrer au couvent Saint-Charles, sur les hauteurs de Nice, et tout a été vendu, dispersé. Les meubles anciens de ma grand-mère O'Connor — elle avait repeint au Ripolin ses fauteuils Louis XVI —, les bibelots, les ustensiles de cuisine, la vaisselle ébréchée, les malles de dentelles et les coffrets de colifichets, tout est parti à la brocante. »

 Donc il s’agit de la pierre de gésier du dodo. Mais si je m’arrête sur ce fait c’est surtout à cause du village mentionné : Mon Désert. Il se trouve qu’il est dans l’actualité mais pas à cause des découvertes d’os de dodo dans la Mare aux songes. Mon Désert st un village qui fut lié autrefois à une « factory », une raffinerie de canne à sucre. Nous sommes en effet dans ce sud-est mauricien dans une zone de forte production de canne. De Souillac vers Mahébourg, il nous est arrivé de prendre une mauvaise route, au cœur des champs, en fait une route privée ouverte à certaines heures, au public. Mais les usines se sont concentrées et ce secteur n’a plus de factory. Petit à petit les habitants sont partis mais aujourd’hui les derniers villageois doivent quitter les lieux au bénéfice d’un complexe touristique ! Ce village va donc disparaître et dernièrement (le 12 mai 2019) un journaliste est allé faire une ultime visite.

«Nous sommes à quelques mètres de la plage de La Cambuse, loin de l’autoroute et du stress, où quelques habitants y vivent toujours, qui ont pris le temps d’accompagner le journaliste pour une visite guidée. À Mon Désert, le climat est très doux. Entre brise légère et soleil de plomb, le village où les avions volent à basse altitude jouit d’une tranquillité sans pareille. À midi à peine, il n’y a plus personne dans les rues, hormis quelques femmes laboureurs dans les champs et les camions qui font le va-et-vient vers l’usine de fabrication de matériaux de construction à Plaine Magnien. Bordé de champs de cannes et de quelques rares maisons construites par l’usine Mon Trésor, Mon Désert, le village a pendant de très longues années vécu au rythme de la propriété sucrière. Aujourd’hui, la plupart des habitants ont quitté le lieu après la fermeture de l’usine et avoir eu un lopin de terre. “Avant, il y avait au moins 500 personnes qui habitaient le village. Il ne reste que quelques maisons”, confie Bélinda Phoebi, ancienne habitante de Mon Désert. Au fil des années, l’usine a été laissée à l’abandon. Il ne reste que la grande cheminée et quelques vieilleries.

“Il y avait une boutique qui s’appelait Coopérative. C’était enn ti-laboutik sinwa. Elle a été détruite, il y a quatre ans. Il y avait aussi un club construit par la propriété Mon Trésor Mon Désert pour célébrer les fêtes. Il n’y a plus grand-chose qui reste”, dit Sylvano Bachelier, 27 ans. Il a vécu à Mon Désert pendant plus de dix ans. Malgré les difficultés, Sylvano Bachelier est heureux d’avoir grandi au sein de ce hameau. “Je vis à Plaine Magnien, mais je viens toujours ici pour me ressourcer. J’aime bien la tranquillité qui y règne.” Il garde de beaux souvenirs de son enfance passée dans ce village. Il nous raconte l’un de ses souvenirs les plus marquants. “Avec mes amis, nous avons passé énormément de temps à nager dans ce bassin. C’était notre piscine.” Le bassin se situe à quelques mètres de l’usine, entre le terrain de football et les champs de cannes. Le village est menacé de disparition. Le groupe Omnicane, anciennement Mon Trésor Mon Désert, envisage de mettre sur pied une smart city dans cette localité. Un lieu où les gens pourront à la fois vivre, travailler et se divertir.

Vivre dans une région éloignée, cela a aussi des inconvénients. “Les habitants ont droit à un autobus toutes les heures. Cela n’a pas changé avec le temps, sauf qu’ils peuvent maintenant compter sur les taxi-maron”, dit Bélinda Phoebi, qui habite aujourd’hui Plaine Magnien (très proche). “Il n’y a que les bus de Curepipe et de Mahébourg qui passent. Pour les autres trajets, il faut se rendre à Plaine Magnien ou à Mahébourg. »

Cette plage sera facilement privatisable puisqu’aucune route publique importante n’y accède ; rien à voir avec Blue Bay qui n’est pas loin. Et si le bruit des avions sera un aspect négatif du complexe, il ne le sera que faiblement vu le trafic aérien limité.

Mon Désert témoigne comme des tas d’autres lieux, de la mutation économique du pays vers toujours plus de tourisme. Mais ce tourisme doit affronter la concurrence (Seychelles) et semble atteindre quelques limites. J-P Damaggio

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