Laguépie cité rouge

Ce tableau de Laguépie que les membres de la délégation spéciale ont rédigé pour obtenir une gendarmerie ne manque pas de piquant. Il est exagéré quand ils écrivent que la commune vit sous le joug communiste depuis 25 ans. La municipalité a été communiste depuis 1920 et a été confirmée par des élections mais en 1939 au moment de l'arrestation des élus communistes le maire ne l'a pas été... J'ai déjà évoqué cette question plusieurs fois : en 1936 suite à un arrticle de presse, par des témoignages que j'avais relevé (j'ai interrogé plusieurs témoins), avec le témoignage d'Elia Granier, j'avais évoqué le monument aux morts, mais je ne trouve pas le document concernant le refus du préfet d'arrêter Mercadié en 1939 car il n'est plus membre du PCF depuis 1934 ! A suivre. JPD

Monsieur le préfet

Nous avons l’honneur d’attirer votre bienveillante attention sur la nécessité qu’il y a de renforcer le service de surveillance de la commune de Laguépie, pour les raisons exposées ci-après :

Il est notoire que l’état d’esprit d’une parie de la population guépienne est différente de celui des communes voisines.

Laguépie a été sous le joug communiste pendant plus de 25 ans. Elle était considérée comme étant la cité rouge de la Région.

Le drapeau rouge était le drapeau national. Le monument aux morts, orné de la faucille et du marteau. Les réunions publiques communistes avaient la priorité.

N’obtenaient le titre de citoyen guépien que ceux qui adhéraient au parti ou sympathisaient avec ses membres.

La population était entièrement soumise à la volonté des maîtres de l’heure. Aucune réaction aucune protestation ouverte de la part de cette population qui avait pourtant pour devise « Je suis autant que toi ». Devise inscrite en gros caractères sur des panneaux que l’on plaçait à tous les carrefours les jours de fête. Ces panneaux existent encore.

La dissolution de la cellule communiste suivie de celle du Conseil municipal à direction communiste a produit un réel soulagement parmi les éléments modérés, muselés depuis de si longues années.

Mais il n’en a pas été de même chez l’élément communiste qui a vu grossir ses effectifs par l’appoint des socialistes et des gaullistes.

Aujourd’hui ces trois partis marchent la main dans la main et ne cessent de manifester sournoisement leur mécontentement et leur hostilité à l’œuvre de rénovation nationale entreprise par le Maréchal Pétain.

En plus des éléments locaux indiqués ci-dessus, Laguépie a vu les réfractaires au nouveau régime s’augmenter d’une façon sensible par de nombreux ressortissants étrangers dont la plupart ont une situation plus ou moins bien défini. Italiens, Portugais, Polonais, Russes, juifs et surtout des espagnols provenant de l’armée rouge. En un mot tous individus qui attendent avec une impatience fébrile, l’heure de la revanche.

Par suite de la réduction des effectifs de la brigade de gendarmerie de Verfeuil et d l’éloignement de ce poste (11 km) de Laguépie, la surveillance de la commune, surtout la nuit, est pour ainsi dire, nulle.

Aussi, au cours de ces six derniers mois nous avons eu à constater de nombreux vols de poules, de lapins, d’outils et de linge et tout dernièrement le cambriolage en règle d’une villa.

En juillet et septembre de nombreuses inscriptions avec menaces et injures à l’adresse du chef de l’Etat, du Gouvernement et d’une puissance étrangère ont été relevées sur plusieurs points de la ville. Des tract avec menaces et injures à l’adresse des mêmes on été trouvés aux portes des habitants de Lez.

Les dirigeants de l’ancienne cellule communiste locale ont constitué un syndicat artisanal.

Tous ces faits ont fait l’objet de comptes-rendus distincts.

Il y a lieu également de tenir compte de la situation géographique communale et industrielle de la Commune.

Laguépie située à l’extrémité du département à 65 km de Montauban et à 2 h de Saint-Antonin est enclavée entes les départements du Tarn et de l’Aveyron.

Sa population totale varie entre 1180 habitants et 1200.

Elle possède deux fabriques de chaussures qui emploient près de 80 ouvriers et ouvrières, trois boucheries, trois charcuteries, trois boulangeries et de nombreux autres commerçants et artisans. La ville de Laguépie étend son action commerciale dans tous les pays environnants. Ses foires et marchés, les plus importants de la région après Villefranche de Rouergue et Figeac, sont très fréquentées parce que les paysans du Ségala et de la vallée de l’Aveyron y trouvent un débouché commode à leurs produits, dans la gare de Laguépie. Traversée par les Route nationale n°122 la ville devient de plus en plus un centre de ravitaillement et de débouché.

Pour toutes les raisons exposées ci-dessus, nous estimons qu’il est indispensable de renforcer le service de police soit par des tournées de nuit plus fréquentes soir par la création d’un poste fixe de gendarmerie à Laguépie.

La question du logement de ce personnel pourrait être assez facilement, réglée.

Il existe à Laguépie trois grands immeubles faciles à aménager pour un poste de trois hommes.

Quelques réparations seraient nécessaires.

Ces trois immeubles sont situés au centre de la ville. L’un est libre et les deux autres sont actuellement occupés part des réfugiés.

Veuillez agréer Monsieur le Préfet, l’expression de nos sentiments les plus respectueux et dévoués.

Mercier-Gasquet-Bartes